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les derviches, elle nous a procuré une de ces rencontres qu’on n’a qu’une fois en sa vie.


Jérusalem, vendredi 6 avril. — Pour comprendre Jérusalem, il faut être préparé par le long chemin qui y mène, en s’élevant sans cesse, du bord de la mer Méditerranée. Jadis on le parcourait à cheval ou en voiture, et le pèlerinage, qui vous faisait suivre étape par étape cette voie sacrée, devait être d’un intérêt particulièrement vivant. Aujourd’hui, le trajet se fait en chemin de fer ; mais le train monte lentement, et l’on a tout loisir de contempler le paysage qui se déroule sous vos yeux ; et il ne manque pas de charme, pour celui qui se trouve transporté tout d’un coup en Palestine, et qui voit pour la première fois ce pays plein de tristesse et de poésie.

La gare de Jaffa, misérable d’aspect, est située à l’extrémité, presque en dehors de la ville. La façade tombe déjà en ruines et le service est mal organisé. Nous montons dans un train bondé, et nous partons, laissant derrière nous les jardins de Jaffa. À notre gauche, nous apercevons au milieu des arbres un joli village européen, blanc aux toits rouges, dont l’aspect propre et gai contraste avec la misère de la ville que nous venons de traverser, c’est la colonie allemande du Temple. Rien de plus curieux que cette communauté, moitié religieuse, moitié politique. À Caïffa dans la baie de Saint-Jean-d’Acre, où ils ont aussi fondé un établissement, nous avons pu les voir de près. Quand on sort de la ville de Gaïffa pour se rendre au mont Carmel, on traverse un quartier dont les rues, bien alignées, sont bordées de maisons européennes, propres et coquettes. Presque toutes ont leur petit jardin ; devant les portes, des enfans qui jouent, d’autres qu’on promène dans leurs petites voitures ; on aperçoit aux fenêtres, dans la rue, des femmes dont les cheveux blonds et le costume feraient croire qu’on se trouve dans une petite ville du Wurtemberg. Ce sont des Allemands, séparés des autres par certaines croyances particulières, qui sont venus s’établir en Palestine, y vivent paisiblement de leur travail et y prospèrent. Leurs champs, vus du haut du Carmel, ressemblent à des carrés de tapis bien entretenus, serrés les uns contre les autres. Un grand drapeau rouge, blanc et noir, planté au haut d’un mât, à l’entrée de leur quartier, prouve qu’ils forment une véritable colonie. À Jaffa comme au Carmel, ils se sont installés en dehors de la ville, dans des terrains abandonnés qu’ils défrichent, et qu’ils ont déjà transformés.

Un peu plus loin, on côtoie les cultures de la colonie agricole de l’Alliance Israélite. Nous traversons des plantations d’oliviers qui donnent l’illusion d’une forêt ; deux grandes