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en province et l’entretien des chevaux et voitures « à Paris ; le chauffage et l’éclairage électrique produit par des machines d’un millier de chevaux-vapeur, consommant 4 000 tonnes de charbon et alimentant 4 000 lampes à incandescence et 360 lampes à arc voltaïque.

La patente, doublée cette année par la loi nouvelle, atteindra 1 million. On estimait naguère à 3 pour 100 la part que l’État devait prélever sur le profit des commerçans ; peu à peu le chiffre est monté en moyenne à 6 pour 100 ; mais, pour les deux plus grands magasins, il va désormais représenter un impôt de plus de 12 pour 100 sur leurs bénéfices ! Une semblable taxation n’est-elle pas peut-être excessive ? Mais si l’on s’était proposé par là de favoriser « le petit commerce », on n’y réussira guère. Le courant est le plus fort. Et le commerce de l’avenir continuera de marcher lentement vers des chiffres de plus en plus élevés, comportant des frais et des gains de plus en plus faibles.

Il est une dépense, presque inconnue à l’ancien négoce qui semble à première vue un vice d’organisation, puisqu’elle charge la marchandise d’un poids mort, sans profit pour le vendeur ni pour l’acheteur : c’est la publicité, qui varie, du Bon Marché au Louvre, de 2 millions et demi à 3 millions de francs. Depuis l’apparition du premier journal d’annonces, — la « feuille d’avis du bureau d’adresses » de Renaudot, il y a 260 ans, — la publicité, qui ne consistait dans le vieux Paris qu’en distribution de « factums » au coin des rues, principalement sur le Pont Neuf, a pris une place de plus en plus grande. Elle aussi est un véritable organisme de la vie moderne. Mais nul n’en use plus largement que le magasin de nouveautés, où elle revêt mille formes ingénieuses : ce sont les 500 petits ballons à grelots, quotidiennement distribués à la jeunesse, qui coûtent au Louvre 50 000 francs par an ; c’est le buffet gratuit qui représente une somme égale ; ce sont les 25 000 bouquets de violettes offerts aux clientes du Printemps, lorsque son patron, le 20 mars, succède à l’hiver ; ou encore les primes gratuites, — tasse à thé, sucrier ou plateau, — que donne la Samaritaine à ses acheteurs du vendredi, afin de corser la vente de ce jour néfaste, en combattant les superstitions antiques qui taquinent encore ce siècle anticlérical.

La presque totalité des sommes consacrées à attirer le public passe en insertions dans les journaux et surtout en catalogues envoyés à domicile. Jusqu’à quel point cette débauche de papier glacé et d’échantillons pourra-t-elle être réduite dans l’avenir ? Je l’ignore. Présentement la publicité est nécessaire aux grands bazars pour lutter les uns contre les autres. Or il est indispensable