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malheureuse avait été poussée à l’exaspération, presque à la folie, par un excès d’injustice et de persécution. N’y a-t-il pas quelquefois un parti pris de défense ? La secrétaire à qui j’exprime mes craintes se met a rire : — « Oh ! répond-elle, quand nous entrons dans l’œuvre, nous avons trop souvent en effet la notion que la femme est toujours intéressante et l’homme toujours coupable, mais nous apprenons vite à distinguer. »

Quoi qu’il en soit, les juges de paix, les commissaires de police, les magistrats tiennent la Protective Agency en haute estime et jugent qu’elle est pour eux une aide par son action prompte, énergique. Il faut savoir tout le mal que font dans une société à peine dégrossie encore, comme celle de Chicago, l’ivrognerie et la brutalité, pour comprendre l’urgence de cette action qui s’exerce sans relâche au nom de la fraternité entre femmes et du sentiment maternel étendu à tous les enfans.

Mais le club accomplit bien d’autres œuvres encore.

Trop souvent, aux États-Unis, les emplois publics sont distribués pour des raisons qui ne profitent qu’aux politiciens de bas étage. Il en résulte d’épouvantables abus. C’est ainsi, que dans certains asiles d’aliénées, les pensionnaires mal nourries, mal vêtues, entassées les unes sur les autres, n’avaient souvent qu’un lit pour trois. Le club intervint, et des femmes médecins furent attachées à ces établissemens qui, depuis lors, sont dirigés à souhait. — Dans toutes les administrations qui ont à statuer sur le sort des femmes, prisons, hospices, asiles de mendicité, les femmes imposent leur présence. C’est grâce au club que des matrones sont aujourd’hui attachées aux bureaux de police ; c’est sous son impulsion qu’a été fondé l’hôpital pour les maladies contagieuses. Un de ses membres, miss Sweet, a inauguré un service d’ambulance en donnant le premier fourgon ; miss Flower a organisé une école d’infirmières ; le docteur Stevenson a obtenu que des bains pour les pauvres fussent établis sur le lac et dans certains quartiers déshérités. — L’Institut des arts doit un prix annuel au Woman’s Club. — Une nouvelle université s’étant ouverte en 1892, à six cents étudians des deux sexes, grâce à des dons particuliers de sept millions de dollars, on s’aperçut, le somptueux édifice une fois achevé, que les étudiantes n’avaient point de dortoirs. Aussitôt le Woman’s Club réunit les fonds nécessaires à la construction d’un bâtiment qui renferme, non seulement des chambres à coucher nombreuses, mais des salons, une salle d’assemblée, une salle à manger, une bibliothèque, un gymnase. — Il s’agissait de réunir dans une école industrielle les jeunes garçons sans domicile ; trois cents acres de terre étaient offerts à la condition que l’on plaçât dessus pour 40 000 dollars de bâtimens ; le club des