à regagner la cour, et, le 17 juillet, il rentrait à Paris. Maintenant on le tenait. Fidèle, il ajoutait par sa présence à l’autorité restaurée de la reine mère ; insoumis ou seulement incertain, on n’avait qu’à lever la main pour le réduire à l’impuissance. Les nouveaux ministres inauguraient par ce coup d’adroite politique l’ère nouvelle dans laquelle entrait le gouvernement de Marie de Médicis. Quant à l’évêque de Luçon, il gagnait d’emblée ses éperons d’habile négociateur et de politique prévoyant.
Une fois Condé à Paris, l’incompatibilité des situations et des caractères apparut clairement, et le duel s’engagea rondement. Le prince réunissait autour de lui toutes les forces de l’opposition, Les concessions qu’on lui avait accordées à Loudun lui donnaient une autorité qui tenait en haleine tous les esprits insoumis. Il était admis dans le conseil et le dirigeait effectivement. Le garde des sceaux Du Vair le secondait sous main : « Le Louvre étoit une solitude, sa maison étoit le Louvre ancien. On ne pouvoit approcher de sa porte pour la multitude du monde qui y abordoit. Tous ceux qui avoient des affaires s’adressoient à lui. Il n’entroit jamais au conseil que les mains pleines de requêtes et mémoires qu’on lui présentoit et qu’il faisoit expédier à sa volonté. » Très enflé de son triomphe, Condé se montrait arrogant, bavard, présomptueux ; mais il avait près de lui un lieutenant autrement redoutable pour la cour, un homme qui le modérait, le calmait et donnait quelque fermeté à son cœur toujours vacillant : c’était Bouillon, conspirateur tenace, esprit adroit et ingénieux, qui passait sa vie à exciter la discorde et qui nageait dans la rébellion. Le duc de Mayenne, le duc de Longueville, étaient, bien entendu, de la partie. Si le chef des protestans, Rohan, se tenait coi, en revanche on avait trouvé moyen de détacher du parti de la reine jusqu’au duc de Guise. Nevers, toujours fou, se trouvait offensé de l’intérêt poli, mais froid, qu’on portait à son rêve de croisade et se mettait aussi à bouder. Tous les anciens ministres, y compris Sully, fomentaient la discorde et attaquaient le pouvoir qu’ils avaient si longtemps servi. L’opposition avait d’autres appuis non moins redoutables : le Parlement, où des esprits bilieux comme le président Le Jay échauffaient les jeunes têtes en faveur de la cour ; le peuple de Paris, qui était en train de se faire un héros du cordonnier Picard. Ces dispositions hostiles à l’égard du gouvernement de Concini se répandaient jusque dans les provinces, et, le 15 août, à Péronne, le peuple, chassant le gouverneur, avait remis la ville aux mains du duc de Longueville. Du dehors, les princes étrangers engagés contre la maison d’Espagne soutenaient les réclamations de Condé.