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gouvernement allemand prend le même engagement pour les pays du centre africain, situés au-delà de la ligne de démarcation et qu’il reconnaît appartenir désormais à la sphère d’influence française. Les deux gouvernemens se reconnaissent respectivement tenus d’appliquer et de faire respecter les dispositions relatives à la liberté de la navigation et du commerce, contenues dans l’acte de Berlin, de même que les clauses de l’acte de Bruxelles, relatives à l’importation des armes et des spiritueux. Ils s’engagent à traiter les commerçans des deux pays sur le pied d’une égalité parfaite en ce qui concerne l’usage des routes ou autres voies de communication terrestres, à les soumettre aux mêmes règles, et à les faire jouir des mêmes avantages au point de vue des acquisitions et installations nécessaires à l’exercice et au développement de leur commerce et de leur industrie. Le protocole doit être ratifié dans les six mois par les deux gouvernemens respectifs.


VI

Le Congo français et le Cameroun allemand vont donc avoir une délimitation bien nette. L’œuvre commencée en 1883 par Nachtigal sur le littoral du golfe de Guinée, continuée par les traités de 1885, de 1886 et de 1893 avec l’Angleterre, par les traités de 1885 et de 1894 avec la France, se sera terminée à la rive gauche du Chari, et au bord méridional du lac Tchad. La colonie allemande n’a plus la forme d’un trapèze que lui avaient donnée les traités de 1885. Sur la carte le dessin qu’elle figure aujourd’hui est autrement pittoresque. On dirait un pélican assis au fond du golfe de Guinée, le dos tourné au littoral, le regard fixé sur le centre africain ; la tête touche au lac Tchad, le col à la Haute-Bénoué, le dos à la mer ; les pattes s’appuient sur la Haute-Sangha. Comme échantillon d’histoire naturelle, le dessin est suffisamment ébauché ; comme division territoriale politique, la conception parait médiocre. A l’exception d’une partie de sa frontière orientale, représentée par le cours du Chari, le Cameroun n’a que des limites idéales. On peut dire d’elles qu’elles ont été tracées dans le ciel et non sur la terre. Les diplomates ne doivent pas être rendus trop responsables de cet état de choses. En l’absence de données géographiques précises, ils ont dû adopter des mensurations géodésiques. Les deux gouvernemens se sont d’ailleurs rendu compte des difficultés que cette manière de procéder pouvait susciter plus tard, et ont sagement stipulé dans une annexe accompagnant le protocole qu’il y aurait lieu,