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la mission à Yola ; le second fut la signature de la convention du 14 août 1893, qui donna aux deux sphères d’influence anglaise et allemande au Niger et au Cameroun une ligne de démarcation complète et définitive. La limite provisoire tracée d’abord du Rio-del-Rey aux rapides du Vieux-Calabar, continuée ensuite jusqu’à, la rive sud du lac Tchad, aboutit en un point situé à 35’ à l’est du méridien de Kouka, correspondant à la distance entre le méridien de Kouka et le 14° de longitude est de Greenwich. A l’ouest de cette ligne, tous les terrains tombèrent dans la sphère d’intérêts allemande. Une certaine portion de territoire à l’est d’Yola ayant pour rayon une ligne partant d’Yola et aboutissant, en un point situé sur la rive gauche de la Bénoué, à 5 kilomètres de l’embouchure de la rivière Faro, fut cependant réservée à l’Angleterre. Il était convenu en outre que l’influence allemande, en ce qui concerne ses relations avec la Grande-Bretagne, ne s’étendrait pas au-delà des bassins de la rivière Chari, et que les pays du Darfour, du Kordofan et du Bahr-el-Ghazal, tels qu’ils sont délimités dans la carte publiée par Justus Perthes en octobre 1891, seraient exclus de la sphère d’influence de l’Allemagne, même au cas où il serait découvert que des affluens du Chari sont situés à l’intérieur de ces pays. Les deux puissances prenaient l’engagement de s’abstenir mutuellement de tout empiétement sur leurs sphères d’influence réciproques ainsi déterminées, de renoncer à faire des acquisitions dans la sphère d’influence l’une de l’autre, d’y conclure des traités, d’y accepter des droits de souveraineté ou de protectorat, et la Grande-Bretagne reconnaissait qu’elle était obligée d’appliquer, en ce qui concerne la partie du Niger et de ses affluens situés dans les pays placés sous sa souveraineté, les dispositions des articles de l’acte de Berlin relatives à la liberté de navigation. L’Allemagne reconnaissait de son côté qu’elle était liée par ces mêmes obligations en ce qui concerne la partie du réseau fluvial placée désormais sous son autorité.

En Angleterre la presque unanimité de l’opinion a fait un accueil favorable à cet accord. Une bonne partie de la presse anglaise, et notamment le Times, crut pouvoir dire que cet arrangement réglait d’une façon satisfaisante une question ayant depuis près de huit ans donné lieu à maintes difficultés, et que l’heureuse issue des négociations menées de part et d’autre par M. Gosselin et le docteur Kayser, chef de l’Office Colonial allemand, dans un égal esprit de conciliation, pouvait être considérée comme un nouveau fruit des rapports si amicaux existant entre l’Allemagne et l’Angleterre dans le traitement de toutes les questions coloniales.