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lesquelles d’ailleurs sont comprises dans moins d’une octave.

Appliquée par son auteur à mesurer le rendement des sources usuelles de lumière, la méthode bolométrique a donné les plus curieux résultats. Ce rendement, en d’autres termes le rapport de l’énergie lumineuse à l’énergie totale, est minime : deux ou trois pour cent avec l’arc électrique, un pour cent avec le bec de gaz, moins encore avec la bougie, qui suffirait à nous éclairer pendant un millier d’heures, dans le cas où toute l’énergie disponible serait dépensée en lumière. MM. Langley et Very ont signalé une source bien autrement économique, le pyrophorus noctilucus, sorte de ver luisant, dont le rendement lumineux est de cent pour cent. Si certains insectes émettent des radiations assez intenses dans les pays chauds pour servir de parure féminine, il semble peu probable que nous demandions jamais aux vers luisans notre éclairage, malgré la perfection merveilleuse de leur appareil éclairant. Toutefois le jour n’est pas éloigné peut-être, où la lumière produite par phosphorescence dans un champ électrostatique remplacera avantageusement les lampes à incandescence, d’un rendement pitoyable. La photométrie a été également l’objet des recherches de W. H. Pickering et de E. L. Nichols (de l’université d’Ithaca), qui ont étudié avec soin les propriétés de différentes sources lumineuses.

M. Langley préside aujourd’hui à Washington la Smithsonian Institution, véritable ministère de la science, dont le budget annuel s’élève à trois millions de francs. Il y continue ses premiers travaux au milieu de laboratoires amplement pourvus, et se livre en même temps à des investigations sur la résistance de l’air atmosphérique ; car le problème de l’aviation hante aussi les cervelles américaines. Jusqu’ici les savans du nouveau monde ne paraissent pas avoir réussi beaucoup mieux que les nôtres à trouver une solution pratique.

Une heure de trajet à peine, par le chemin de fer, sépare Washington de Baltimore où nous visitons un autre établissement scientifique de premier ordre, l’université Johns Hopkins, fondée en 1870 par un marchand de la ville, qui consacra à cette œuvre trois millions et demi de dollars, presque dix-huit millions de francs. L’institut de physique est supérieurement organisé pour l’électricité et pour les études spectrales, comme l’on doit s’y attendre d’après les travaux de son directeur, M. Rowland.

Nul n’ignore qu’en analysant, avec le prisme, la lumière émanée d’une source quelconque, nous pouvons connaître la composition chimique de la source et même, grâce à M. Fizeau, son mouvement suivant le rayon vecteur. Ainsi la lumière qui arrive