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trottoir mobile. Le train de l’intramural comprenait quatre ou cinq voitures, dont l’une était munie d’un moteur de cent vingt-cinq chevaux. Pendant la journée consacrée spécialement aux chemins de fer, railroad day, on attela jusqu’à huit voitures qui emmenèrent chaque fois plus de huit cents voyageurs, et transportèrent ainsi, du matin au soir, plus de soixante mille personnes. Le même jour, une locomotive électrique lutta, sans trop de désavantage, contre une locomotive à vapeur de la ligne Baltimore-Ohio, quoique ne pesant guère que le quart de sa puissante rivale.

Quant au trottoir mobile, dont l’idée, on le sait, fut mise en avant par M. Henard à propos de notre dernière exposition universelle, il se développait suivant une ligne sans fin, d’environ treize cents mètres, et se composait essentiellement de deux plates-formes superposées. La plus large, avançant de cinq kilomètres à peu près par heure, servait d’accès à la plus étroite qui, reposant sur les roues de la première, marchait à dix kilomètres ; le passage du sol à la première plate-forme et de celle-ci à la deuxième était plus facile que la montée dans un tramway de faible vitesse. Comme pour l’intramural, la prise du courant se faisait sur un seul rail médian isolé. On pouvait, avec une dépense de cent chevaux, transporter trente mille personnes à l’heure. Du reste, ce trottoir mobile, placé sur une espèce de promontoire solitaire et ne présentant aucune application pratique, constituait simplement un hors-d’œuvre curieux de la World’s Fair. Comment les Américains n’ont-ils pas encore réalisé la mobilisation des trottoirs dans leurs cités populeuses, où les rues, à certains momens de la journée, sont envahies par un véritable flot humain ? Les rues qui marchent, quel système conviendrait mieux à des gens toujours pressés, toujours absorbés par le souci des affaires, allant droit devant eux sans regarder personne ni tourner la tête, le cant l’interdit, fût-ce pour réjouir leurs yeux par la vue d’un joli visage ?

La télégraphie électrique, qui doit déjà tant aux travaux de Morse, était représentée, dans la section américaine, par une intéressante invention du professeur Elisha Gray, le télautographe, chargé, comme son nom l’indique, de transmettre l’écriture. Deux styles installés, le premier à la station de départ, le second à la station d’arrivée, sont commandés chacun par deux fils, dont les longueurs respectives définissent la position du style en coordonnées bipolaires ; chaque fil s’attache d’une part au style et s’enroule d’autre part sur une poulie qui, dans l’appareil récepteur, exécute un mouvement identique à celui de la poulie correspondante dans l’appareil transmetteur. Inutile d’ajouter que cette identité est obtenue au moyen de courans électriques qui circulent entre les deux stations à travers quatre fils distincts. Si donc on