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les mieux informés des progrès de l’optique, tels que M. Volkmann et M. H. Poincaré, s’efforcer, dans leurs spéculations sur la lumière, de tenir la balance égale entre les vibrations et les courans de déplacement.


X

Faudrait-il donc, si la théorie électromagnétique de la lumière venait à triompher de la théorie élastique, renoncer à l’idée que la lumière n’est, en dernière analyse, qu’un mouvement ? faudrait-il admettre en la matière autre chose que l’étendue en longueur, largeur et profondeur ? faudrait-il y mettre une qualité première, irréductible aux grandeurs, figures et mouvemens, savoir : cette qualité que l’on exprime en disant d’un diélectrique qu’il est polarisé ? La physique de notre siècle, pénétrée jusqu’aux moelles d’idées cartésiennes, s’y résoudrait sans doute difficilement. Que les disciples de Descartes se rassurent ; le triomphe de la théorie électromagnétique ne trancherait pas par la négative la question de savoir si tout, dans la nature physique, se réduit aux grandeurs, figures et mouvemens ; une pareille décision passe la compétence de la physique ; à cette question : Les lois de la lumière ne sont-elles que des conséquences des principes de la mécanique ? la théorie électromagnétique substitue simplement celle-ci : Les phénomènes électriques sont-ils réductibles au mouvement ?

Des tentatives ont déjà été faites, notamment par sir W. Thomson et par Maxwell, pour réduire au mouvement l’ensemble des phénomènes magnétiques, électriques et lumineux ; étrange et compliquée est la constitution que ces physiciens sont obligés d’attribuer même aux diélectriques les plus simples, même à l’éther ; que l’on imagine un gâteau de miel, avec ses cellules en cire solide, remplies de miel liquide ; que l’on remplace la larve qui habite chaque loge par une sorte de petite toupie, composée également de miel et tournant avec une extrême vitesse au sein du miel immobile qui la baigne ; on aura une reproduction fidèle de la constitution qu’ils attribuent à l’éther ; les phénomènes qui se produisent dans les parois de cire interposées aux cellules, les déformations qu’elles éprouvent, les réactions élastiques dont elles sont le siège, représentent les effets de la polarisation diélectrique ; les modifications qu’éprouvent les toupies de miel (les vortex), leurs changemens de vitesse et d’orientation, nous représentent les actions magnétiques. Lorsqu’on lit le développement de ces hypothèses, que sir W. Thomson et Maxwell ont poussé très