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intéresse surtout comme le signe du changement qui s’est produit dans l’attitude du public à l’égard de la science ; et s’il reste de lui un souvenir, on se le rappellera comme un des plus hardis et des plus brillans défenseurs de l’esprit scientifique nouveau. »



J’ai signalé ici, il y a quelques mois, l’émotion produite dans le public anglais par les considérations pessimistes du docteur Pearson sur la décadence imminente des races européennes, et de la race anglaise en particulier. Cette émotion n’est pas près de finir, à en juger par le nombre des articles de revue où M. Pearson est encore pris à partie. C’est ainsi qu’un savant, le lieutenant-colonel Elsdale, lui reproche, dans la Contemporary Review, son peu de respect pour la science. Il ne peut lui pardonner, surtout, d’avoir osé affirmer que les grandes découvertes scientifiques étaient désormais faites, et que l’avenir aurait seulement à compléter, à vulgariser l’œuvre du passé. « Comment, s’écrie-t-il, vous assignez des limites à la force inventive de l’humanité ! » Et, sans plus tarder, il se met en position d’indiquer les principales découvertes qui ne peuvent manquer d’être faites dans un avenir très prochain.

Il y en a quatre, à son avis, dont la génération qui nous suit trouvera tous les élémens préparés d’avance : quatre découvertes si importantes qu’elles auront pour effet de transformer de fond en comble la vie de l’humanité.

D’abord, la conquête de l’air. Elle se réalisera non point par des ballons, mais par des machines volantes, et M. Elsdale voit déjà le temps où l’on pourra aller de Londres à Paris, par voie d’air, en vingt-cinq minutes. On le pourra même d’autant plus facilement qu’on n’aura pas à craindre de tomber à l’eau en traversant la Manche : car s’il nous promet la conquête de l’air, M. Elsdale nous autorise en outre à espérer la conquête de l’eau. Aussi bien, il est plus facile de nager que de voler.

Les deux autres problèmes dont parle M. Elsdale sont, suivant lui, plus importans encore, mais il n’en parle qu’en passant, et sans indiquer les moyens qui vont servir à les résoudre. Le premier, c’est l’utilisation directe de la chaleur emmagasinée dans le charbon. Le second, c’est la mise à la portée de l’estomac humain de toute la nourriture végétale dont s’alimentent les animaux. « Les élémens chimiques de cette nourriture, dit-il, sont pareils à ceux des végétaux que nous mangeons : le tout serait donc que nous arrivions à les digérer. Et à cela les progrès de la chimie et de la médecine ne sauraient manquer de nous faire bientôt parvenir. » Voilà donc quelle sera, d’après M. Elsdale, le