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aux chambres de commerce intéressées. Tout cela est incontestablement utile. Mais le commerce sait lui-même, par les missions, par les agens d’une exceptionnelle compétence qu’il envoie sur les lieux de production et de consommation, se procurer ces sortes de renseignemens, et ce sont d’autres renseignemens qu’il attend de l’administration et du gouvernement. Ce qu’il lui faut, ce sont ou bien des renseignemens d’ordre très général qui fournissent une base à ses propres enquêtes, ou bien des renseignemens tout à fait spéciaux que, presque seul le gouvernement peut obtenir avec rapidité. Tel port a été déclaré en quarantaine. Tel tarif douanier vient d’être ou va être mis en vigueur. Telle loi est promulguée dans telle colonie. Telle assemblée locale a voté telle taxe applicable à partir de telle date. Tel produit est menacé par toile proposition de tel conseil général. Voilà de ces circonstances d’une réelle importance, dont les particuliers sont rarement informés en temps opportun, que le ministère des Colonies connaît tout de suite, et que tout de suite il doit faire connaître au commerce. C’est de cette façon surtout qu’il peut lui être utile.


Les émigrans réclament de l’administration un concours d’un autre genre. A ceux-là, au contraire, il faut mettre les points sur les i. Ils ont tout à apprendre ; on ne leur en dira jamais assez. Et ces émigrans ne sont plus maintenant une quantité négligeable. Autrefois, le chiffre de l’émigration française s’élevait par an à 5 ou 6 000 personnes ; aujourd’hui, à en croire du moins la statistique des pays où nos émigrans débarquent, elle monte bien à 30 ou 40000. Je ne dis pas qu’en leur ouvrant un bureau d’informations, on en détournerait une proportion sérieuse vers nos colonies. Je ne dis même pas que cela serait actuellement souhaitable : le temps n’est pas encore venu de la grande émigration vers les colonies françaises. Mais j’estime que ceux qui veulent y émigrer doivent pouvoir se renseigner pleinement au ministère des colonies, au lieu, comme ils font aujourd’hui, de s’adresser à des sociétés privées.

A la tête de ce bureau d’émigration, il conviendrait de mettre un ancien fonctionnaire des colonies, qui aurait beaucoup voyagé, et vu et observé. Il ferait, — comme le font, à Londres, l’Emigrant’s Information office, et à Paris, l’Union Coloniale Française, — rédiger pour chaque colonie le Guide pratique de l’Emigrant, dans lequel on mettrait, sous la forme la plus claire, les renseignemens indispensables à de pauvres gens en quête d’une nouvelle patrie : comment on y va, comment on y vit, comment on y travaille, les objets à emporter, les soins à prendre, etc., et, pour certaines