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font peu de cas des théories et prétendent, à l’imitation des Anglais, se tirer d’affaire tout seuls, sans principes, sans études, guidés par le seul bon sens et l’expérience de chaque jour.

Est-ce à dire pourtant que tant de travaux considérables doivent être à jamais perdus ? N’est-il pas certain que les connaissances que l’on acquiert à grand’peine par vingt années de pratique peuvent s’acquérir en quelques mois par des études qui nous font profiter de toute l’expérience des anciens et qui nous permettent, au fur et à mesure que nous devenons nous-mêmes plus expérimentés, de mieux appliquer et quelquefois d’améliorer les règles qu’ils nous ont laissées ?

Tous les hommes de cheval sérieux sont unanimes à reconnaître qu’une bonne méthode de dressage doit prévenir la ruine d’un grand nombre de chevaux qui, faute d’être convenablement conduits, sont usés prématurément ou deviennent dangereux et occasionnent de graves accidens. Il est d’ailleurs incontestable que si la même méthode était invariablement suivie partout, si tous les chevaux dressés par les mêmes procédés pouvaient être indistinctement et facilement montés par tous les cavaliers ayant de leur côté reçu les mêmes principes, il en résulterait des avantages immenses dans la pratique, surtout au point de vue militaire.

Mais à quelle méthode s’arrêter ? Il devient ici fort difficile de s’entendre, chaque écuyer ayant ses idées personnelles dont il ne veut pas démordre, peut-être parce qu’on n’a jamais comparé entre eux tous les systèmes successivement adoptés. C’est cette dernière tâche que je vais m’efforcer d’accomplir. Comme je voudrais pouvoir intéresser toutes les personnes ayant quelque goût pour les questions hippiques, je prie les hommes de cheval de me permettre d’entrer quelquefois dans des explications qui seraient inutiles si je m’adressais à eux seuls et, d’autre part, j’espère que les lecteurs imparfaitement initiés voudront bien m’excuser si je ne puis pas toujours éviter certains détails techniques. Après avoir passé en revue les principales méthodes de dressage employées jusqu’ici, je dirai quels enseignemens il nu ; semble qu’il faut tirer de cette étude rétrospective.


I

Lorsque, à l’époque de la Renaissance, l’équitation fut remise en honneur en Italie, les procédés de dressage se ressentaient nécessairement des coutumes barbares qui venaient de régner en l’Europe ; ils devaient s’en ressentir pendant longtemps et, aujourd’hui encore, ils n’en ont pas complètement perdu l’empreinte.