Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 122.djvu/877

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Parmi les « maisons hautes » qui peuvent captiver le plus l’attention, il faut citer l’Hôtel Waldorf, à New-York. Les constructeurs ont pris leurs aises et ont réuni plusieurs parcelles de terrain sur lesquelles ils ont élevé un édifice colossal, très pittoresque, très varié en ses lignes et en ses saillies, mais dépourvu d’unité et d’harmonie. Dans la même ville, le Metropolitan Life ins. C°. a des allures monumentales qui dénotent un esprit français. L’architecte, M. Lebrun, a multiplié les colonnes et les ornemens ; il semble s’être souvenu de la profusion de détails dont Visconti a revêtu les façades du nouveau Louvre. L’un des plus étranges de ces curieux édifices est le Mutual reserve fund lice Association, dont l’architecte est M. William H. Hume. Il est divisé horizontalement en trois zones qui forment en quelque sorte trois maisons superposées.

Les douze étages sont bien marqués et regardent les passans par trois cents fenêtres. The Manhattan life Insurance aura quinze étages et formera une tour aussi en trois zones. Ce n’est encore qu’un projet de M. Stephen D. Hatch, En revanche, la maison de la Poste et du Câble est bâtie depuis plusieurs années. Sa façade est d’une simplicité brutale.

Quelques architectes, plus curieux d’économiser le terrain et l’argent que de satisfaire aux besoins de l’esthétique, se sont bornés à élever des murailles nues, sans divisions ni horizontales ni verticales. C’est la construction « pratique » par excellence. Le Venetian Building, à Chicago, en est le plus parfait modèle. C’est un cube de douze étages sur rez-de-chaussée avec un toit saillant. Il n’y a rien de vénitien dans son architecture. Beaucoup d’hôtels meublés sont construits de la même manière économique et sobre ; mais, à l’intérieur, l’aspect change. Les offices, bureaux, magasins gardent une simplicité primitive : le nécessaire, rien de plus ; mais dès qu’il s’agit d’une salle de réunion, d’un restaurant, d’un théâtre, la note change. Tout ce que le luxe moderne peut entasser de couleurs, de faïences peintes, de mosaïques, de dorures, s’accumule à plaisir, avec une abondance, une surcharge dont notre goût français serait plus blessé qu’ébloui. Sauf la chambre à coucher, beaucoup de ces édifices renferment tout ce qui est nécessaire à la vie, y compris l’art et les plaisirs. Encore en est-il où la chambre à coucher elle-même se rencontre à côté du théâtre et du bureau d’affaires. Le Masonic Temple ne possède pas seulement, comme son nom le fait pressentir, l’office, les salles, les bureaux consacrés au service d’une branche de la franc-maçonnerie américaine. Tout ce service n’occupe que deux étages de la maison, les quinzième et seizième, sur les dix-neuf qui se dressent au-dessus du rez-de-chaussée. Le dix-neuvième étage est occupé