Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 121.djvu/440

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous n’avons pas à dire avec quelle scrupuleuse probité cette administration s’acquitte de son mandat.

Quant aux griefs qui visent plus spécialement la minoterie et la semoulerie, ils ne sont pas plus sérieux, s’il faut en croire le ministre de l’agriculture. « Il y a un petit abus, disait M. Viger dans la séance du 14 décembre 1893, mais cet abus n’est pas considérable ; je m’explique.

« Sur 800 000 quintaux environ de farines importées cette année, au titre de l’admission temporaire, qui ont été présentés au taux moyen de blutage de 33 pour 100, le résidu représentait 33 kilos pour 100 kilos de blé, soit 204 000 quintaux en totalité qui ont supporté le droit de 60 centimes par 100 kilos imposé au son.

« En admettant que cette quantité ait contenu 13 à 14 pour 100 de farine qui aurait dû payer le droit du blé, vous voyez tout de suite, par un calcul très simple, que le blé introduit en franchise par cette porte n’est pas suffisant pour influencer le marché.

« Cependant, nous tenons à ce que toute espèce, non pas de fraude, — car il n’y a pas de fraude, puisque cette pratique est permise par la loi, — mais de tissure, par laquelle une partie des droits se perdrait et ne serait pas perçue au profit du Trésor, soit fermée.

« Aussi prendrons-nous toutes les mesures nécessaires pour que le résidu paye le droit suivant la quantité de son et suivant la proportion de farine qu’il contient. »

Eh bien ! l’honorable ministre a pris là un engagement dangereux, qui aurait des effets plus funestes encore pour le pays et le Trésor que pour la minoterie et la semoulerie.

Il devrait se souvenir cependant que lorsqu’en 1890, pour complaire à des exigences par trop fiscales, on a modifié le régime de la raffinerie de sucre en lui imposant l’exercice, cette industrie s’est trouvée directement lésée dans son exportation, et qu’elle s’est soustraite aux mesures prises contre elle en émigrant à l’étranger. Ce départ constitue pour nous une double perte, à laquelle l’agriculture ne saurait être insensible, et prouve que le commerce d’exportation ne doit point être traité avec une excessive sévérité. Les risques de non-paiement ou d’insuccès qu’il court en envoyant sa marchandise au-delà des frontières nécessitent une certaine marge sans laquelle toutes chances de bénéfice disparaissent, les transactions s’arrêtent, et une source de revenus et de richesse se trouve tarie du même coup.

Reste enfin la question des tarifs de pénétration. Il s’agissait en réalité d’un tarif réduit applicable aux marchandises allant de Dunkerque à Nancy, tarit que l’on avait établi pour éviter que la région de l’Est ne fût approvisionnée directement par Anvers.