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ESSAIS ET NOTICES

L’ÉDUCATION DE LA VOLONTÉ
L’Éducation de la Volonté, par M. Jules Payot, 1 vol. in-8o ; F. Alcan.

Comme on ne peut pas tout lire, — on le devrait, mais on ne le peut pas, — ce livre m’avait échappé quand, en le feuilletant l’autre jour, j’y rencontrai ces lignes, qui me parurent pleines de sens : « Nous louons beaucoup, en France, l’éducation athlétique que reçoivent les jeunes gens anglais, et nous l’admirons sans discernement… En revanche, Matthew Arnold portait envie au système d’éducation français… Ce qui, d’après lui, caractériserait les barbares et les philistins, c’est que les premiers n’aimeraient… que les exercices du corps, le sport, les plaisirs bruyans… et, d’après lui, l’éducation anglaise tendrait à augmenter le nombre des barbares. » Sur quoi, l’auteur, plus fort encore de sa conviction que de la parole de Matthew Arnold, continuait en ces termes : « Ce n’est donc point l’Angleterre que nous devons imiter sous ce rapport, mais bien la Suède… On s’y occupe de faire des jeunes gens robustes et sains, et on y a compris que l’abus des exercices physiques conduit au surmenage plus sûrement que l’étude excessive. » Je n’approuvai pas moins, quand j’y arrivai, cet autre endroit du livre : « L’Allemagne nous a fait beaucoup de mal en nous communiquant ses fausses conceptions sur l’érudition. L’érudition n’est point la science ! Il s’en faut de peu qu’elle en soit la négation. Le mot « science » nous suggère aussitôt l’idée de savoir accumulé, tandis qu’il devrait nous suggérer l’idée d’un esprit hardi, vigoureux, plein d’initiative, mais extrêmement prudent dans la vérification. » L’auteur disait encore : « L’érudition tend à étourdir l’esprit ; l’amas des petits faits encombre la mémoire ; un esprit supérieur laisse dans ses notes le plus de choses possible ; l’honneur d’être un dictionnaire vivant ne le tente point… » Et ce fut là-dessus que je lus tout le livre.

C’est un bon livre, assez mal composé d’ailleurs, et où quelque inexpérience, — pour ne pas dire quelque naïveté, — se mêle à beaucoup de