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En vain des ans nouveaux s’épuisaient les clepsydres ;
Plus vieux, l’arbre, au rebours de l’homme, était plus beau ;
Ses têtes renaissaient comme celles des hydres,
Et sa racine allait réveiller le tombeau.

Or il roula si bien ses anneaux de couleuvre,
Or il couvrit la plaine entière d’un tel poids,
Que le Seigneur le vit, s’admira dans son œuvre,
Et dit à l’arbre vert qui paraissait un bois :

« Arbre, je veux pour toi faire une chose encore,
Car tu mis à profit et ton temps et ton suc ;
De quel honneur nouveau veux-tu qu’on te décore,
Ô toi qui sus vieillir sans devenir caduc ?

Veux-tu plus de rameaux, ou veux-tu plus de feuilles ?
Veux-tu que plus d’oiseaux t’emplissent de leur bruit ?
Je voudrai ce que tu voudras, quoi que tu veuilles… »
— Et l’arbre murmura : « Produire encore un fruit ! »


II.


LES ÉLIZABETH


J’ai dit Élizabeth la Sainte de Hongrie
Dont la charité change en rose l’aliment
Qu’elle portait au pauvre, et sur qui se récrie
Son époux, qui l’admire et s’exalte en l’aimant.

J’ai dit Élizabeth la Reine d’Angleterre,
Pleine de parfums forts, que le peintre espagnol
Quabero nous peignit, et pleine de mystère
Sous sa robe fleurie où perche un rossignol.