purement religieux. Aucun mobile supérieur ne paraît l’avoir dominé. Cruel, passionné, inflexible, tel qu’il faut être pour réussir dans un mauvais milieu, il ne considérait en tout que son intérêt personnel. Il voyait le monde comme il est, et, nature grossière, il l’aimait. La religion, la philosophie, le patriotisme, la vertu n’avaient pas de sens pour lui. Il n’aimait pas les Juifs ; peut-être aima-t-il un peu l’Idumée ou, pour mieux dire, Ascalon. C’était, en somme, une fort belle bête, un lion à qui on ne tient compte que de sa large encolure et de son épaisse crinière, sans lui demander le sens moral. Après tout, il valait bien Jean Hyrcan et Alexandre Jannée. Étranger à toute idée religieuse, il réussit un moment à faire taire le fanatisme ; mais son œuvre ne pouvait être qu’éphémère. Le génie religieux d’Israël anéantit bien vite toute trace de ce qu’il avait créé. Il ne resta de lui que des ruines grandioses et une affreuse légende. Le peuple, en ses légendes, n’a jamais complètement tort. Hérode n’essaya pas de tuer Jésus, qui ne naquit que quatre ans après sa mort ; mais il travailla à l’inverse du christianisme ; il n’empêcha rien, il ne fit rien ; à sa mort, il descendit dans le néant : il avait fait sa volonté, non celle de Dieu.
Sa volonté était des plus simples. Il voulait dominer pour les profits qu’on en tire. Il ne tenait pas à gouverner le peuple juif plutôt qu’un autre peuple. Souvent même il dut trouver que le sort l’avait loti de sujets désagréables. Les Juifs étant à sa portée, il voulait être leur roi. Il avait un avantage : c’était, tout en étant circoncis, d’être un étranger. La Judée ne pouvait plus avoir un souverain national. Antipater, son père, avait fait les trois quarts du chemin dans ce programme : remplacer les Asmonéens affaiblis avec le secours de la grande force du temps, les Romains. Hérode acheva ce qui restait à faire. Dans les grandes luttes du temps, il fut un desultor habile, passant rapidement du parti vaincu au parti vainqueur. Pour comble de bonheur, Auguste, en ses jours, fit régner la grande paix romaine. Appuyé au roc inébranlable de l’amitié d’un dieu, il fut dieu lui aussi. Celui qui était admis à cet Olympe devenait un associé de Jupiter : ille deûm vitam accipiet.
Une malveillance universelle de tous les partis hiérosolymitains accueillit le demi-juif que la nomination du sénat et l’exploit de Sosius venaient de leur donner pour roi. Les premiers actes d’Hérode entré dans Jérusalem furent terribles. Il fit exécuter quarante-cinq des plus notables partisans d’Antigone et confisqua leurs biens. On alla jusqu’à secouer les morts pour faire tomber l’or et l’argent qu’on pouvait avoir cachés dans leur lin-