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Quelques régions de l’Australie semblent ne pas avoir encore été atteintes par la variole.

La rougeole paraît avoir fait son apparition en Europe à peu près à la même époque que la variole ; elle était bien connue et elle est bien décrite par les Arabes et notamment par Rhazés sous le nom de Hasbah : elle n’a cessé d’être endémique dans nos pays. C’est une maladie franchement contagieuse, et son origine spontanée n’a jamais pu être rigoureusement démontrée. Aussi est-il des pays où son existence n’a pas encore été constatée, témoin l’Australie. Dans d’autres contrées elle n’a donné lieu qu’à quelques épidémies, puis s’est éteinte pour ne reparaître qu’à la suite d’une nouvelle importation. C’est ce qui a eu lieu pour des îles éloignées, telles que l’Islande, les îles Feroë, qui, en raison de leur distance même, n’ont que des relations restreintes avec le continent. À cet égard, l’épidémie qui a régné en 1847 dans ces îles et qui a été décrite par un médecin danois, le distingué et regretté Panum, est particulièrement instructive.

Depuis 65 ans, la rougeole n’y avait pas été observée. Aussi fit-elle de grands ravages quand, par un cas provenant du continent, et ayant été importée, elle se répandit sur une population vierge de la maladie. Tous les individus âgés de moins de 65 ans et qui n’avaient pas acquis l’immunité par une atteinte antérieure furent frappés, et sur 7 782 habitans, 6 000 tombèrent malades. L’épidémie des îles Feroë a très nettement établi qu’aucun âge ne fait cesser l’aptitude à contracter la rougeole, et si, parmi nous, c’est surtout une maladie de l’enfance et de la jeunesse, cela tient uniquement à ce que des sujets plus âgés ont déjà payé leur tribut à la maladie et ont ainsi gagné l’immunité.

La relation de Panum donne des détails précis au point de vue de la transmission. Les Feroë forment un groupe de 17 îles, séparées les unes des autres par des courans marins souvent dangereux. Il était facile d’y suivre pas à pas le coulage. Aucun cas ne se manifeste sans que l’individu atteint ait été en contact très proche avec un malade. C’est la cohabitation, la visite dans la chambre d’un malade, qui causent la contamination ; l’isolement de quelques maisons a suffi à préserver leurs habitans.

Tandis que la variole et la rougeole ont en Orient leur origine première, la scarlatine semble être une affection européenne. Elle est particulièrement une maladie anglaise. Elle sévit cruellement à Londres, où elle a, dans les causes de la mortalité générale, une part très importante. Les décès provenant de la scarlatine y varient entre 2 000 et 6 000, tandis qu’on n’en compte qu’une centaine, année moyenne, à Paris.

À Philadelphie, la mortalité par la scarlatine est 20 fois plus