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étudié attentivement la principale de ces compagnies, celle qui a servi de type aux autres, le Sun-Mill, s’exprime ainsi : « Dans cet établissement, les ouvriers avaient une grande partie des actions, et au début une résolution fut votée pour que les actionnaires et leurs familles eussent un droit de priorité pour les emplois… Je suis informée à l’heure présente que peu, — si quelques-uns, — des ouvriers sont actionnaires (few, if any, of the employees happen to be shareholders). La participation aux bénéfices pour les principaux employés ou ouvriers avait été introduite en 1869) ; elle fut abandonnée en 1875… M. Marcroft, l’historien du Sun-Mill, ajoute que « ceux qui participaient aux bénéfices avaient vu réduire leurs salaires, et qu’on releva ceux-ci lors de la suppression de la participation. » D’après miss Potter, le Sun-Mill est le type « de l’histoire générale des filatures de coton établies primitivement dans l’intérêt des ouvriers. À présent, tous les plans de participation ont été abandonnés dans les Working class limited, Compagnies de la classe ouvrière à responsabilité limitée[1]. » Il paraît que les ouvriers qui sont restés actionnaires le sont, de préférence, d’autres fabriques que celles où ils travaillent. Il est difficile d’expliquer le sentiment d’où vient cette anomalie. En 1885, le rapport de la Conférence pour l’étude des rémunérations industrielles établissait que moins de 2 pour 100 des actions d’une quelconque de ces filatures d’Oldham appartenaient aux ouvriers qui y étaient employés. Un déposant devant la Commission du travail, Labour Commission, M. Mullin, interrogé sur la proportion des ouvriers des filatures coopératives qui étaient actionnaires, répondait : « Je ne crois pas qu’il y ait 1 pour 100 des ouvriers ; il peut y avoir des actionnaires parmi les surveillans, contremaîtres, directeurs : je ne les compte pas. »

Ces associations qui ne peuvent plus figurer parmi les sociétés coopératives de production ont cependant gardé, au point de vue de leurs affaires, certains traits particuliers et intéressans. Elles ont fondé une fédération (the Cotton Buying Company, limited) pour les pourvoir de matières premières. Un intérêt de 7 l/2 pour 100 est payé sur le capital-actions de cette société ; le surplus des profits est réparti entre les acheteurs, ceux d’entre eux qui sont actionnaires recevant une part double.

Si l’on quitte Oldham et que l’on examine les associations coopératives diverses de production dans la Grande-Bretagne, l’impression que l’on a reçue se fortifie : ces sociétés s’éloignent graduellement du type coopératif pur ; elles s’en écartent d’autant plus qu’elles réussissent mieux. D’après le rapport de l’Union

  1. Schloss, Methods of Industrial Rémunération, pages 205-206.