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Schulze-Delitzsch, et les néo-coopérateurs le lui reprochent amèrement. « Le système Schulze-Delitzsch, dit encore M. Wolff, a été le premier à prendre pied, et de beaucoup le plus grand nombre des associations actuellement existantes fonctionne en conformité de ses règles. Mais vers l’année 1886 le peuple a commencé à en être mécontent. Des reproches très durs lui furent adressés, alléguant qu’il avait manqué à satisfaire les demandes qu’il faisait profession de servir. L’administration des associations n’était pas ce qu’elle aurait dû être ; il y avait de la spéculation, il y avait des pertes[1], il y avait un intérêt excessif ; il y avait du désappointement, etc. Et à la diète de la Basse-Autriche, province métropolitaine, des attaques très vives furent faites contre le schulze-delitzschisme ; il en résulta un vote de fonds pour envoyer deux employés expérimentés procéder, dans les provinces du Rhin, à un examen sur place des principaux mérites du système Raiffeisen. Ils en revinrent enchantés de ce qu’ils avaient vu. Leur rapport fut entièrement favorable, et, depuis ce jour, les associations Raiffeisen sont les favorites officielles et populaires en Autriche[2]. » On a vu que l’expansion de ces dernières est très récente ; quand elles seront plus âgées de 20 ou 30 ans, qui dit qu’elles ne soulèveront pas des critiques aussi vives, quoique d’autre nature, que les banques de Schulze-Delitzsch, sensiblement leurs aînées ? La défaveur actuelle de celles-ci est un fâcheux précédent.

En Italie, les banques populaires se sont aussi singulièrement répandues, grâce au vieil esprit d’association italien, à l’habitude traditionnelle en ce pays des opérations de banque et à la propagande infatigable de quelques hommes de mérite : MM. Vigano et. Luzzali. Là aussi, Schulze, que l’on imitait, fut l’objet de critiques et de dénigremens. On perfectionna, à certains points de vue, son système ; peut-être aussi l’affaiblit-on. M. Luzzati, qui se mit à l’œuvre vers 1863, a pu dire : « Nous n’avons pas copié une institution, mais produit un nouveau type, et, en lui imprimant le cachet de l’originalité italienne, nous avons créé les Banques populaires, Banche popolari. » Le système paraît être une combinaison de l’organisme de Schulze-Delitzsch et de celui de Raiffeisen. On y rejette la responsabilité illimitée des membres ; on y prend des précautions pour que les banques populaires ne perdent jamais leur caractère et ne deviennent pas de simples sociétés

  1. On a vu que ces pertes s’étaient élevées à 1 237000 marks, plus de I 500 000 francs. en 1891-1892. Bien entendu, pour tout l’ensemble des associations, elles étaient beaucoup plus que compensées par les bénéfices. Mais, comme ces associations sont indépendantes les unes des autres, la situation d’un certain nombre a dû être très ébranlée, et plusieurs ont dû devenir insolvables. L’année précédente les pertes avaient été plus considérables.
  2. People’s Banks, p. 119.