Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 120.djvu/484

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur les fonds français, refuge suprême des capitaux expulsés des placemens compromis ou désillusionnés des gros revenus, et sur les fonds russes, valeur sympathique au plus haut degré.

La rente française 3 pour 100 a été portée, en quelques jours, par un mouvement ininterrompu, de 98.20 à 99.15 et s’est tenue ensuite au-dessus de 99 francs. L’action de l’épargne, toujours lente et à peine sensible dans ses effets au jour le jour, n’a pas été seule en jeu dans cette poussée de notre principal fonds d’État. L’intervention de la spéculation n’est pas douteuse ; elle s’est produite au moment opportun, arrêtant la dépréciation des fonds internationaux et apportant comme une sorte de signal pour la reprise des affaires depuis si longtemps et toujours si vainement attendue. L’amortissable et le 4 1/2 pour 100 ont suivi le 3 pour 100 perpétuel : le premier a été porté de 98.20 à 98.90, le second de 103.55 (ex-coupon trimestriel de 1 fr. 125) à 104.65. La rentrée des Chambres a remis au premier rang des préoccupations la question de la conversion de la rente 4 1/2 pour 100. Le système qui semble en ce moment avoir le plus de chance d’être adopté est celui d’une réduction de l’intérêt à 3 1/2 pour 100 avec garantie contre toute nouvelle conversion, ou plutôt réduction de l’intérêt, pendant huit ou dix années. Il ne s’agit d’ailleurs là que d’une conjecture. En tout cas, ce système soulève d’assez sérieuses objections ; on lui reproche l’inconvénient de laisser subsister deux types différens de rente, l’un de 3 pour 100, l’autre de 3 1/2, celui-ci devant se coter immédiatement au-dessus du pair, sans toutefois s’en éloigner beaucoup, et peser ainsi sur les cours du 3 pour 100.

Les fonds russes ont monté avec les fonds français, parallélisme naturel. L’emprunt d’Orient a détaché un coupon semestriel le 13 courant, et s’est négocié le même jour à 67.60 après 67.75. Or le cours de compensation fin octobre était 67.30. Cette valeur s’est donc élevée, dans cette quinzaine, de tout le montant du coupon qui est de 1 fr. 55, et de 30 centimes en plus. Le Consolidé or 4 pour 100 a gagné exactement une unité à 99.60 ; le 3 pour 100, 60 centimes à 81 francs.

Cette plus-value des rentes françaises et russes a permis à la spéculation, qui s’affolait à la baisse sur l’Italien, l’Extérieure et les fonds subalternes, de recouvrer ses esprits. Le gouvernement italien ayant très opportunément annoncé la mise en paiement, à partir du 10 novembre, du coupon de la rente dans l’intérieur du royaume, un revirement s’est produit, et les rachats des vendeurs en bénéfice ont relevé les prix de deux unités à 80.50. Ce cours n’a pu être maintenu toutefois et la dernière cote est 79.80. La perte au change ne s’est nullement détendue, et reste au niveau de 15 pour 100. Le ministère Giolitti est violemment battu en brèche ; le décret imposant le paiement en monnaie métallique des droits de douane à l’importation a été publié