Libourne ; un grand pas était franchi, et Mazarin pouvait poursuivre son œuvre.
Vers la fin de juillet, le cardinal s’établissait à Saint-Jean de Luz ; don Luis de Haro descendait à Fontarabie, de Lionne à Hendaye. Le 13 août, première conférence dans l’île des Faisans, au milieu de la Bidassoa. Nous ne soulèverons les lourdes tapisseries qui enveloppent les deux ministres que pour écouter ce qui concerne « l’affaire du prince de Condé » : là était d’ailleurs le nœud de la négociation.
Mazarin savait où il voulait en venir quand, avec la connivence de Pimentel et le concours d’une plume impitoyable, il refusait tout à Condé dans le traité de Paris. La dureté des conditions infligées à M. le Prince, acceptées par Philippe IV, va fournir au cardinal l’arme qu’il saura manier pour faire subir à don Luis de Haro certaines prétentions habilement masquées d’abord. Son plan est bien arrêté ; il n’improvise rien. Tout ce qu’il se propose d’accorder à M. le Prince en dehors des dix articles du 4 juin sera le prix de nouveaux avantages assurés à la France. Parfaitement fixé sur ce qu’il veut avoir et ce qu’il peut abandonner, Mazarin attendra l’heure ; au moment de la conclusion, il aura encore de la marge devant lui, et pourra « réserver pour l’avenir les autres choses qu’on avait résolu de faire »[1].
Aujourd’hui il se montre inébranlable, bien décidé à ne pas démordre des dix articles. Il le dit à tout venant ; que ce soit un secrétaire de M. le Prince[2] reçu à Bayonne au passage, ou un vieux courtisan comme Gramont, qui profite d’une visite à Bidache pour risquer une timide tentative[3], la réponse est la même ; au premier mot, il arrête son interlocuteur : le traité du 4 juin ! on n’en sortira pas ; tout est réglé. C’est le refrain de ses conversations avec don Luis de Haro, et toujours il lui ferme la bouche. Enfin l’Espagnol perd patience : « Non, tout n’est pas réglé ; car si vous ne voulez pas écouter nos justes réclamations contre une véritable surprise, il reste à déterminer les récompenses (compensations) que S. M. Catholique peut offrir à M. le Prince, et à connaître celles qui ne sont pas suspectes au roi de France : le gouvernement des Pays-Bas ? — Dites-moi donc comment M. le Prince pourra concilier deux sermens à des souverains différens. — Des places près de la frontière ? — Alors qu’il se fasse naturaliser Espagnol. D’ailleurs il a déclaré qu’il n’accepterait des places que pour les remettre au roi mon maître. — Un état indépendant entre Sambre et Meuse ? — Y pensez-vous ? Si M. le Comte (de