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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE





31 octobre.


Aux environs de l’an 1000 de notre ère, un évêque, que les chroniques ne nomment point, annonça qu’il avait reçu du ciel, d’une manière miraculeuse, l’ordre de prêcher la paix à la terre. Ce fut l’origine de la « Trêve de Dieu » qui, durant trente-six heures par semaine, empêchait les gens de se « malfaire » les uns aux autres. L’idée fit son chemin, puisque ses promoteurs arrivèrent un peu plus tard à reporter au mercredi soir la suspension d’armes hebdomadaire qui commençait originairement au samedi.

C’est une trêve analogue, à laquelle nous souhaitons le même succès, — trêve à nos luttes intérieures, aux durs propos de la politique, — que les fêtes franco-russes nous ont procurée. À cet égard, bien qu’attristée par la mort de deux de nos plus illustres concitoyens, le maréchal de Mac-Mahon et Charles Gounod, la quinzaine qui se termine aujourd’hui comptera comme une période heureuse. Même la perte que la France éprouvait, en la personne du loyal soldat qui fut, pendant plus de six années, son premier magistrat, augmenta encore cette sorte d’effusion civique, cette sympathie touchante dans laquelle on vivait comme baigné.

L’union patriotique avec laquelle toutes les classes de la nation fêtaient l’amiral Avellan et les officiers de l’escadre russe imposait silence aux dissensions intestines de la France ; les hommages rendus par la plupart des souverains, par les chefs des armées étrangères

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