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La rente italienne a profité de ces bonnes dispositions des membres de l’Union ; de 82.65, prix le plus bas, coté quelques jours après la liquidation, elle a pu se relever à 84 francs. C’est le taux élevé du report, 0 fr. 10 en moyenne, et la tension du change à 13 pour 100, qui avait provoqué ce recul à 82.65. Aujourd’hui la tendance est moins pessimiste et l’on en donne les raisons suivantes : le président du conseil, M. Giolitti, rentré à Rome, le 6 courant, a calmé les ardeurs intempestives de son collègue de la guerre, le général Pelloux. On commençait à s’inquiéter d’une concentration inusitée de troupes sur la frontière des Alpes ; des notes officieuses avertirent le public que c’était une simple précaution contre le choléra. Le public crut ou ne crut pas ; l’essentiel est que les classes qui avaient été retenues sous les drapeaux ont été, depuis le 6, renvoyées dans leurs foyers. D’autre part, le maréchal de Mac-Mahon étant malade, le roi Humbert a envoyé un télégramme sympathique, évoquant les glorieux souvenirs de la confraternité d’armes de 1859, parlant de la reconnaissance des Italiens et de la vaillance de l’armée française. Enfin, the last not the least, le gouvernement italien a obtenu à Berlin d’un puissant syndicat financier, où figure l’établissement officiel la Seehandlung, l’avance d’une somme de 40 millions de marks, d’aucuns disent de 80 millions. Tous ces faits sont symptomatiques d’une pression énergique exercée à Rome pour enrayer un entraînement dangereux. Le mot d’ordre est-il venu de Berlin ou de Vienne, ou des deux capitales ? Le fait patent est le retour à un certain calme et au bon sens en Italie même ; si le danger d’une conflagration a existé un moment, il n’existe plus.

Il est donc rationnel que la campagne de baisse sur l’Italien subisse un temps d’arrêt, même qu’une reprise se produise, mais la situation financière du pays reste critique. Les Allemands ne veulent prêter que si l’équilibre budgétaire est rétabli, ce qui ne peut se faire que par de nouveaux impôts, et la population déclare par ses représentans qu’elle paie tout ce qu’elle peut payer et ne donnera rien au-delà ; cercle vicieux. Il y aurait bien un moyen, la suppression de deux corps d’armée ; mais de ce remède, on ne veut entendre parler en aucun cas à Rome. Le discours que M. Giolitti va prononcer, le 18 courant, à Dronero édifiera le public sur son programme financier.

L’argent a été très serré, à la fin de septembre, à Berlin et à Vienne ; sur la première de ces places, les taux s’élevèrent jusqu’à 6 pour 100 ; en Autriche, l’escompte a dû être élevé de 1 pour 100 par la Banque austro-hongroise, et le change, agio de l’or sur la valuta, dépasse 5 pour 100. En Angleterre, au contraire, les disponibilités sont tellement abondantes, que la Banque, au lendemain même de l’échéance trimestrielle, a dû abaisser le taux de son escompte à 3 pour 100 ; les taux sur le marché libre sont d’ailleurs fort au-dessous de ce niveau.