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Girard, a introduit en France quelques variétés allemandes à grands rendemens, a indiqué le mode de culture qu’il convient de leur appliquer, et a réussi à augmenter dans une large mesure la production de ces précieux tubercules ; ils servent non-seulement à l’alimentation humaine, mais aussi à celle des porcs, et cette année, on en fera certainement consommer aux bêtes à cornes. — Habituellement cependant, elles reçoivent plutôt des drèches, c’est-à-dire les résidus de la fabrication de l’alcool obtenu par la saccharification et la fermentation des pommes de terre ; les drèches de brasserie sont aussi de précieux alimens dont les cultivateurs du nord et de l’est font un large emploi.

Les praticiens de l’Ouest trouveront aussi dans les marcs de pommes une puissante ressource. On sait que la sécheresse du printemps a été très favorable à la fécondation des fleurs des arbres fruitiers et que les pommiers notamment portent une énorme quantité de fruits ; il est facile d’en saisir la raison ; pour qu’un fruit se noue, il faut que le pollen des étamines, des organes mâles, féconde les ovules qui sont la partie essentielle des pistils, organes femelles des fleurs ; bien que ces pistils varient de forme à l’infini, ils comprennent essentiellement trois parties : l’ovaire habituellement renflé et renfermant les ovules sur lesquels doit s’exercer l’influence de l’organe mâle, le style, sorte de colonne rétrécie que surmonte le stigmate. C’est sur sa surface souvent poisseuse que tombent les grains jaunâtres du pollen ; ils y germent, y développent un tube, le boyau pollénique, qui s’engage dans un tissu particulier du style : le tissu conducteur, y rampe, s’y allonge, en dissolvant et assimilant les cellules entre lesquelles il se glisse, jusqu’à atteindre l’ovaire où il s’introduit, pour rencontrer une petite ouverture de l’ovule, le micropyle, dans lequel il pénètre. Le protoplasme mâle s’unit à ce moment au protoplasme femelle, et la fécondation a lieu.

Un temps sec la favorise. Si au moment de la floraison la pluie survient, le pollen peut être entraîné ; s’il persiste à la surface du stigmate et y germe, le boyau pollénique s’y contourne sans s’enfoncer dans le tissu conducteur ; les fleurs coulent et la récolte est perdue. Quand la fécondation a eu lieu, que les jeunes ovules commencent à grossir, le succès n’est pas encore assuré. Les gelées printanières sont funestes ; les fleurs atteintes se détachent, jonchent le sol ; tout est compromis. Ces gelées tardives atteignent particulièrement la vigne et sont bien plus à craindre dans les plaines que sur les coteaux. J’en ai sous les yeux, au moment où j’écris, un exemple frappant ; la vigne est chargée de raisins sur toutes les pentes qui bordent la Limagne d’Auvergne ; dans la plaine, la gelée a tout détruit.