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tendre, que les tiges sont moins coriaces, et souvent, pour assurer la consommation complète de la plante, on espace les semis de semaine en semaine, et on porte aux étables le maïs aussitôt qu’il arrive à un développement convenable. Dès la fin de septembre, il faut abattre ce qui reste de la récolte, car le maïs est facilement atteint par la gelée, et les imprudens voient très souvent un champ vert, luxuriant, le soir, blanchi, gelé, le lendemain matin, ayant perdu toute valeur.

Que faire du maïs qui excède les besoins de la consommation journalière ? Parfois, on le sèche comme du foin ; dans le midi notamment, c’est ainsi qu’on opère ; mais depuis une trentaine d’années, dans le centre, dans le nord, on conserve le maïs par l’ensilage.

On sait que les matières végétales humides exposées à l’air sont la proie des moisissures, des champignons qui les brûlent lentement ; cette combustion lente détermine des élévations de température notables : les maraîchers qui transportent des légumes frais dans de grands sacs s’assurent de temps à autre qu’ils ne chauffent pas ; si cet accident se produit, il faut vider les sacs, exposer les végétaux à l’air pour les refroidir et arrêter la combustion. Pour qu’elle devienne dangereuse, deux conditions sont, en effet, nécessaires : l’accumulation de la matière végétale en masses suffisantes pour qu’elle s’échauffe et, en outre, le contact de l’air ; si l’une de ces conditions fait défaut, l’action des moisissures est arrêtée ; l’ensilage a précisément pour but de soustraire le fourrage à l’action de l’oxygène atmosphérique. La masse ensilée ne se conserve pas entièrement à son état primitif, elle éprouve une sorte de fermentation restreinte, dont la nature varie avec le mode d’ensilage employé.

Au fond d’une grange dont les murs sont assez résistans pour supporter une forte poussée, on accumule par assises régulières le maïs, les graminées, le trèfle, la luzerne, que les conditions atmosphériques ne permettent pas de sécher ; les voitures se succèdent rapidement, les hommes montés sur le tas égalisent les couches de fourrage et les tassent en les piétinant ; à mesure que la masse s’élève, on dresse en avant sur la paroi restée libre des planches, que des pieux enfonces dans le sol maintiennent solidement.

Quand toute la récolte à conserver est ainsi arrivée à la grange, on recouvre la masse avec de la paille, puis des pierres, des madriers ou même de la terre, on charge de façon que la pression soit considérable, sans que cependant elle détermine l’écoulement des liquides à la partie inférieure. Si cet accident se produit, il faut se