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leurs revues d’agronomie, ont multiplié les indications, personne ne s’est découragé, on a continué la lutte ; les intérêts en jeu représentent des sommes tellement énormes, la diminution de nos têtes de bétail serait un tel désastre, qu’on ne put se résigner à attendre, sans rien faire, qu’une dépression arrivant de l’Atlantique nous amenât la pluie tant désirée.

On prit à ce moment, bien à regret, une résolution qui entraînera pendant de nombreuses années des pertes considérables ; on autorisa l’entrée du bétail dans les forêts de l’État et dans les bois communaux ; le sol des bois est souvent couvert d’une herbe dure que les animaux ne consomment qu’avec répugnance, mais ils sont au contraire très friands des feuilles de certaines espèces, des bourgeons, des jeunes tiges ; dans l’Est, où la forêt couvre de larges surfaces, et où la sécheresse était terrible, ce fut une grande ressource. On cite, dans la Haute-Marne, d’importans troupeaux de race bovine, qui ont vécu dès le mois de juin du pâturage en forêts ; dans la Haute-Saône, le soulagement a été considérable ; dans le Loiret, les cultivateurs voisins des forêts d’Orléans et de Montargis y ont envoyé leurs animaux ; dans la Côte-d’Or, dans l’Yonne, les forêts ont encore été d’une grande ressource.

Visiblement, cette alimentation ne convient qu’aux animaux maigres, habitués à la portion congrue ; le bétail, déjà en état, dépérit quand il est soumis au pâturage de la forêt, les vaches tarissent, enfin les animaux ont vécu, mais non sans causer de grands dommages… Cette solution était-elle la meilleure à adopter et, quitte à entamer la rigueur de nos proscriptions douanières, ne pouvait-on éviter de ravager nos forêts ? C’est ce que nous discuterons un peu plus loin.

Parmi les plantes fourragères qu’on sème au commencement de l’été, en première ligne, se place le maïs ; dans le midi, il est cultivé pour son grain ; il mûrit également dans l’est de l’Europe, dans les provinces danubiennes ; les États-Unis en produisent d’énormes quantités. Dans le centre et dans le nord de la France, la température estivale n’est pas assez élevée pour que le grain mûrisse ; mais le maïs n’en est pas moins semé sur de grandes surfaces, il est coupé encore vert et employé comme fourrage. Quand il est placé sur une terre bien fumée, et que l’été est humide, il fournit des rendemens élevés, souvent 60 et 80 tonnes de fourrage vert à l’hectare. Cette année, on l’a semé sur les terres qui avaient porté du trèfle incarnat ou du seigle qu’on a coupé avant maturité, pour remplacer le foin manquant, et comme il a plu en juin et en juillet, les rendemens sont assez élevés ; les animaux consomment d’autant plus volontiers le maïs fourrage, qu’il est plus