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depuis 1860. Il continua d’être constamment réélu jusqu’en l’année 1890, où, âgé et déjà malade, il déclina toute candidature accepta un siège au sénat. Jusqu’à la fin, il prit part aux travaux du parlement ; il s’y montra toujours fidèle aux principes de libéralisme qui avaient été ceux de sa jeunesse, et l’un de ses derniers discours fut destiné à combattre l’article 174 du nouveau code pénal italien, qui punissait les prétendus abus de pouvoir et d’influence commis par les prêtres dans leurs relations privées et dans l’administration des sacremens. Ainsi la politique jacobine, que l’Italie a pratiquée dans ces derniers temps, a rencontré un adversaire résolu chez un homme qui avait pris une part active à la révolution toscane, et n’avait pas hésité à s’associer, par son vote, à la destruction du pouvoir temporel. Certaines questions de l’histoire contemporaine de l’Italie sont parfois si mal comprises chez nous, que quelques personnes peut-être pourront trouver là un contraste. Pareille attitude n’est pourtant pas rare en Italie, où le pouvoir temporel n’apparaît à personne comme un dogme, et où beaucoup d’hommes savent unir au respect et souvent à la pratique du catholicisme un grand attachement à l’unité de leur patrie. Ubaldino Peruzzi en a été un exemple.

Mais la politique ne l’absorbait pas tout entier. Il était de ces députés, nombreux au-delà des Alpes, qui passent leur vie en chemin de fer, ne viennent à la chambre que pour les séances importantes, et se réservent pour les affaires locales. On sait combien sont multipliées, en Italie, les œuvres charitables ou d’utilité générale, fondées, entretenues, dirigées par des particuliers. Leur nombre atteste la persistance de l’esprit d’association et de dévouaient au bien public, qui a jadis enfanté tant de merveilles ; leur prospérité, dans un pays relativement pauvre, et dont l’administration prête à tant de critiques, prouve une fois de plus combien l’initiative privée peut se montrer supérieure à la routine bureaucratique. À Florence, il n’est aucune peut-être de ces œuvres qui n’ait dû quelque chose au dévoûment d’Ubaldino Peruzzi. Il suffisait à tout, avec l’activité calme qui était l’un des traits de sa nature. L’instruction publique surtout l’intéressait. Il fut le fondateur du Cercle philologique pour l’enseignement pratique des langues vivantes ; il présidait le conseil d’administration de l’Institut d’études supérieures qui tient lieu à Florence d’université, et la Società Dantesca (l’étude de Dante est pour tout bon Italien plus qu’un goût littéraire, et presque un devoir patriotique). Il fut un de ceux qui favorisèrent l’intelligente initiative du marquis Alfieri quand il fonda l’Instituto di scienze politiche, sur le modèle de notre École des sciences politiques. Son rêve eût été de faire