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est assez développée en Haute-Saône, surtout dans l’arrondissement de Lure où l’on compte 40 à 45 scieries qui débitent 25,000 mètres cubes. Ces scieries fournissent des produits variés : charpente, placage, sabots, galoches, formes de chaussures mécaniques, ébénisterie, mobilier scolaire, bois de batellerie, douelles pour foudres, chaises simples ou sculptées. Parmi les autres industries dérivées du bois, je citerai les fabriques de pâtes à papier de Novillars, Besançon et Torpes qui consomment 21,000 mètres cubes, les usines du pays de Montbéliard qui emploient le bois de hêtre pour outils d’agriculture et articles de ménage, les forges d’Audincourt, de Pont-de-Roide et de Saint-Hippolyte qui se servent encore du charbon de bois. Les chaiseries de MM. Lebrun et Valsaire à Saint-Loup-sur-Semouse méritent une mention spéciale : celle de M. Lebrun occupe des bâtimens considérables, éclairés à la lumière électrique, où 500 ouvriers fabriquent avec succès des meubles de toute espèce, les plus élégans comme les plus simples ; ils semblent fort heureux et le mot grève sonne mal à leurs oreilles. On rencontre dans cette maison des types assez distincts de travail et de travailleurs ; le travail à la pièce et le travail à la journée ; les femmes gagnant 1 fr. 50 à 2 fr. 50, les jeunes garçons 3 et 4 francs, les Parisiens, plus habiles que les indigènes, arrivant à se faire des journées de 12 à 15 francs, moins économes aussi, dépensant leur argent au jour le jour. Voici un sculpteur qui, en 18 heures, a gagné 55 francs. Saint-Loup est pour eux un pays de Cocagne, ils se disputent les primeurs, ne se refusent aucune distraction ; la bicyclette est fort en honneur ici, ils la louent à raison de vingt sous par heure, et, si l’on observe que c’est une lourde dépense : Oh bien ! répond l’un d’eux, s’il faut se priver, à quoi bon vivre ? Un autre va trouver son patron, demande 100 francs sur son salaire, afin de passer à Paris les fêtes de la Toussaint : « Qu’est-ce que vous voulez que je fasse ici ? » remarque-t-il du ton le plus convaincu.

La superficie du département de la Haute-Saône mesure 534,095 hectares, les bois occupent 162,111 hectares, ou 30 pour 100 de la surface totale qui se répartit ainsi : terres labourées, 178,716 ; prés, 68,500 ; vignes, 11,917 ; jardins, propriétés plantées, 5,000 ; landes, 21,992 ; chemins, rivières, propriétés bâties, 85,859. Il y a 6,831 hectares de forêts de l’État, 638 aux établissemens publics, 40,975 aux particuliers. 540 hect. 47 en futaie pleine à 150 ans, 435 hect. 57 en futaie jardinée à 140 ans, 113,328 hect. 35 en taillis composé de 21 à 30 ans, voilà pour l’aménagement des forêts communales. Un quart de la contenance ou du volume exploitable est mis en réserve pour subvenir aux besoins urgens, extraordinaires ou imprévus. À chaque coupe on épargne aussi 40 à