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au sous-ingénieur des ponts et chaussées, M. Brémontier.» L’abbé remit la copie, Brémontier en prit possession et ne la rendit jamais.

Il n’est donc pas possible de savoir exactement quels étaient les procédés préconisés par Desbiey et dont la commission de 1769 avait constaté les bons effets, puisqu’elle avait chargé l’abbé de rédiger son rapport. On est porté à croire, d’après divers indices ou d’après des allusions trouvées dans les travaux et rapports faits dans la suite, qu’ils consistaient à élever sur la dune même des rangées de barricades parallèlement à la mer et à planter entre elles des pieds de vigne qui, provignés tous les deux ans, fixaient le sable et le protégeaient contre le vent. La méthode était d’ailleurs employée depuis trois siècles en plusieurs localités avoisinantes, au Capbreton, à Messanges et à Saint-Julien. Brémontier, par la lecture du mémoire de Desbiey, fut informé de tout ce qui avait été tenté le long de la côte et dont l’expérience avait démontré le degré d’efficacité.

En 1778, le roi Louis XVI, dans le dessein d’améliorer le bassin d’Arcachon et d’en faire, ainsi que l’avait conseillé Vauban, un refuge pour les vaisseaux de guerre, envoya le baron Charlevoix de Villers, ingénieur de la marine, visiter les lieux. De Villers ne pouvait manquer de prendre en sérieuse considération la fixation des dunes et il proposa dans ce dessein l’emploi de clayonnages et de serais de graines de pin. Trois ans après, il fut remplacé par le sous-inspecteur des ponts et chaussées Nicolas Théodore Brémontier, qui, sans rien changer aux procédés de son prédécesseur, obtint du roi, en 1787, un crédit de 25,000 livres pour exécuter des essais.

Pendant les séjours que ses fonctions l’avaient obligé à faire dans la région, Brémontier était entré en relations avec Pierre Peychan de la Teste, propriétaire de forêts, qui avait étudié la question et lui communiqua les résultats satisfaisans de ses propres expériences. L’ingénieur n’eut pas de peine à comprendre le parti à tirer d’un collaborateur aussi précieux et lui proposa de l’aider. Peychan accepta. On commença les travaux, d’abord à la dune du Pilat, en 1787, puis dans la plaine de Moulleau, en 1788. Mais contre les avis formels de Peychan, qui conseillait de recouvrir les semis de rameaux disposés régulièrement sur le sol, afin de les protéger jusqu’au moment de la germination, Brémontier se borna à semer des graines de pin et de genêt, qui furent immédiatement balayées par le vent. L’insuccès fut complet et le travail arrêté.

Il fut repris en 1791 par Peychan, autorisé par le directoire du département de ta Gironde, sur l’emplacement aujourd’hui occupé par la ville d’hiver d’Arcachon. Cette fois, on n’eut garde de manquer de recouvrir les semis. Le succès montra combien la précaution