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dans le cas où le service de deux ans ne rencontrera pas des obstacles insurmontables et qu’il est impossible de prévoir dès à présent, ne reviendront pas en 1899 au service de trois ans. » De leur côté, les députés antisémites, qui, par leur nombre, sont aujourd’hui devenus un appoint intéressant de la majorité, avaient fait savoir qu’ils ne voteraient la loi que si le ministère s’engageait à proposer un impôt sur les opérations de Bourse. Ils l’ont votée, mais le chancelier, ou plutôt M. Miquel, ministre des finances de Prusse, qui vient de joindre à son portefeuille la trésorerie impériale, ne s’est engagé à rien.

Le Reichstag s’est contenté d’autoriser les dépenses qu’entraîne l’adoption du système nouveau, — 90 millions de francs pour cette année et 30 millions pour les suivantes, — sans s’occuper des recettes destinées à y faire face. La recherche des impôts à créer sera l’affaire des ministres confédérés, qui se réuniront à cet effet à Francfort dans le courant du mois d’août.

De ce que la loi militaire ait été si aisément enlevée à Berlin, il ne s’ensuit pas que l’Allemagne y soit en majorité favorable. Par un curieux effet de découpage des circonscriptions, les partis ne sont nullement représentés au Reichstag en proportion de leur importance. Les progressistes, qui ont encore près d’un million de voix n’ont pas le tiers du chiffre des députés conservateurs qui pourtant n’atteignent guère à plus de la moitié de leurs suffrages. Les socialistes, qui ont moitié moins de députés que le centre, ont cependant un nombre égal et même plus élevé d’électeurs. Le parlement de l’empire se trouve donc dans cette situation, dont on a vu ailleurs plus d’un exemple, mais qui n’en est pas moins anormale et périlleuse à la longue, de n’être nullement l’exacte expression du suffrage universel dont il tient ses pouvoirs. Il faut aussi remarquer que la majorité du 15 juillet, en faveur de la loi, vient surtout de la Prusse. Presque en bloc, l’Allemagne du Sud a voté contre : en Bavière, on compte plus des quatre cinquièmes des députés dans l’opposition ; en Wurtemberg, on en compte 14 sur 17. C’est là un fait inquiétant pour les directeurs de la politique au-delà du Rhin, et ils feront bien de n’user qu’avec circonspection de la majorité actuelle.

Le même conseil aurait pu être donné pour d’autres motifs au gouvernement de Belgrade, s’il ne s’était désintéressé tout d’abord, avec bien trop de timidité, de la campagne fâcheuse où le parlement serbe s’est engagé. Il s’agit du procès intenté, par la majorité radicale actuelle, à l’ancien ministère libéral présidé par M. Avakoumowitch. Après le coup d’État accompli au mois d’avril parle jeune roi Alexandre, coup d’État accueilli en Europe, comme on s’en souvient, avec une réelle faveur, puisqu’il rendait la parole au pays, des élections avaient eu lieu pour la Skouptchina. Les libéraux qui ne s’étaient maintenus aux affaires que par des coups de parti, annulant les élections et ne