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en toile, montée sur quatre roues, est devenue un élégant wagonnet.

Les comportes conviennent mieux aux petites exploitations : on s’en servait jadis dans le Narbonnais de préférence aux pastières. Elles présentent l’avantage d’être plus faciles à manier et à décharger et rendent encore de grands services dans les domaines où les chemins sont mauvais ou mal tenus.

Lorsque la charrette amène sa cargaison de raisins à la cave, le viticulteur méridional se trouve en présence d’un problème de mécanique pratique susceptible de diverses solutions. Le cellier, vaste bâtiment rectangulaire, renferme une double rangée d’immenses « foudres » dans lesquels doit cuver la vendange, il s’agit donc d’élever les raisins au niveau général des orifices supérieurs des foudres, c’est-à-dire à cinq ou six mètres au-dessus du sol, et cela au moins de frais possible.

Le procédé le plus simple est peut-être aussi le meilleur. On fait gravir au véhicule et à son attelage une rampe, sorte de plan incliné à pente douce disposé parallèlement au cellier, et on décharge le tombereau à la pelle, procédé qui n’a pas besoin d’explication et qui présente l’avantage d’équivaloir à un foulage grossier. Quelquefois, le wagonnet plein porté sur la charrette, une fois arrivé au niveau des foudres, roule directement jusqu’à l’entonnoir du récipient dans lequel doit s’opérer la fermentation.

Dans plus d’une grande exploitation, on épargne à l’attelage du tombereau la peine de s’élever sur le plan incliné : la vendange se décharge dans un bassin creusé dans le sol et s’élève à la hauteur voulue au moyen d’une chaîne à godets actionnée par une machine à vapeur, un manège, ou même plus simplement manœuvrée à bras d’hommes.

On a encore essayé, sans trop de succès, d’arriver au même but au moyen de pompes élévatoires (dans le seul cas, bien entendu, où l’égrappage était pratiqué) ou de vis sans fin. Ajoutons que, si la récolte s’entasse dans des comportes, ces récipiens sont hissés par des poulies jusqu’au niveau convenable, et que l’on utilise alors la traction d’un cheval.

Nos pères agissaient bien différemment, il y a trente ans, et il est permis de se demander si les procédés passablement routiniers qu’ils suivaient n’ont pas été trop décriés et même, par compensation, n’offraient pas certains avantages. Beaucoup de propriétaires, dans des exploitations très importantes, emploient encore pour la fermentation de la grappe leurs vieilles cuves en maçonnerie, concurremment avec leurs foudres, et ne s’en trouvent pas plus mal. Le piétinement des raisins, qui a inspiré aux caricaturistes tant de joyeuses plaisanteries, n’est évidemment plus praticable en dehors