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rendraient d’immenses services, au moins pendant les premières années. Ce n’est pas que le problème n’ait été creusé : on a cherché à tirer parti des croisemens des vignes indigènes avec le Rupestris, déjà, recommandés comme porte-greffe. L’influence hybridante du Rupestris est favorable en ce qui concerne la résistance au mildew et, du reste, elle hâte la précocité au point de vue de la date de maturation, circonstance très heureuse dans le nord de la France. En revanche, elle exalte d’une façon déplorable la tendance à la coulure. Mais comme ce dernier accident devient plus rare avec un ceps adulte et qu’il peut, d’ailleurs, s’atténuer par une sélection sévère lors du choix des boutures, il est possible qu’à force d’essais on arrive un jour ou l’autre au but souhaité. On a signalé, du reste, au congrès un alicante Bouschet x Rupestris assez fertile et qui pourra rendre de bons services, une fois son immunité absolue bien constatée.


II.

Quoi qu’il en soit, on greffe actuellement et il est probable qu’on greffera toujours sur des souches de production nulle ou médiocre. Quel est le meilleur procédé à suivre pour s’assurer une bonne soudure et une production hâtive ? Sur ce point, le sud-ouest[1] et le sud-est, personnifiés chacun par d’éminens agronomes, se sont livrés à de longs débats desquels il ressort que, près de l’Océan, l’humidité permet l’emploi en grand de la greffe dite herbacée ou en écusson ; mais que, sur les bords de la Méditerranée, la vigne refuse obstinément de vouloir se laisser traiter comme un simple églantier qu’on transforme en rosier à fleurs doubles. Il faut se résigner à décapiter le sujet au printemps, au risque de le voir quelquefois succomber en cas de non-réussite. De même, on n’a pas pu s’accorder complètement sur l’efficacité de la protection des soudures au moyen d’un bouchon ou d’une plaque de liège, ainsi que cela se pratique aux deux extrémités du vignoble français, dans Maine-et-Loire et dans le Var. Mais laissons là la discussion de procédés trop familiers aux praticiens, trop peu intéressans pour la masse des lecteurs, pour être expliqués ici.

Toutes les vieilles variétés françaises ont avec leurs sœurs d’Amérique assez d’affinité pour qu’après le greffage une soudure des plus parfaites s’établisse, sans risque aucun de décollement, ainsi qu’il arrive, par exemple, lorsqu’on veut faire croître un

  1. Il est à noter que plusieurs viticulteurs du Var ou des Pyrénées-Orientales sont souvent venus appuyer de leurs avis, dans le cours de la discussion, les orateurs girondins.