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LES
ITALIENS D'AUJOURD'HUI

II.[1]
LES MAISONS DE ROME ET LA CAMPAGNE DE ROME.

Il ne faudrait pas visiter Rome. Il faudrait l’habiter, la contempler à ses heures de suprême beauté, lui dire des mots d’amour dont une ville a l’air de sourire comme une femme. Et ce sont là des momens rares, imprévus, que les guides sont impuissans à préparer, et dont la douceur prend l’âme, tout au fond. Tenez, vous revenez, par exemple, un soir, d’une course lointaine à quelque ruine, avec la lassitude de l’histoire, des notes érudites, de tout l’appareil destiné à soulever notre admiration et qui la tue le plus souvent ; vous revenez, c’est le crépuscule. Les vapeurs montent de la vaste plaine, et sont rouges au couchant. Vous suivez une rue sombre, et vous levez les yeux. Devant vous, la colline est en pleine lumière, barrée de hautes façades jaunes, groupe étage de palais dont chacun est une merveille de grandeur, dont l’ensemble est un chef-d’œuvre de fantaisie, et que tache çà et là un petit cyprès noir ou la gerbe d’un palmier. Vous vous retournez : derrière, il n’y a plus que des ombres bleues, des toits de maisons qui ne sont que de longues lignes d’azur, des courbes infiniment pures de

  1. Voyez la Revue du 1er juillet.