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s’exercer que sur place et par quelques fabrications de lainages et de cotonnades grossières dans les familles d’Indiens. Le cuir seul était travaillé avec un goût qui rappelait l’introduction des arts espagnols après la conquête. Guanajuato et Silao ont conservé des fabriques de cordouanerie très remarquables. La sellerie mexicaine n’a pas de rivale. La fabrication des cigares et des cigarettes, qui répond à un besoin national, répandu jusque chez les femmes, a été poussée aussi à un grand degré de perfection dans des ateliers où le travail manuel est presque exclusivement employé.

Mais le Mexique a la prétention de devenir aussi un État manufacturier et, embarrassé comme il l’est de trouver des ressources fiscales, l’élévation du tarif douanier se colore aux yeux des populations du prétexte de développer les industries nationales ! Un certain nombre de manufactures de textiles se sont élevées là où des chutes d’eau donnaient la force motrice. C’est toujours par là que commence l’industrie. Il y avait en 1889 121 manufactures employant la laine ou le coton. Quelques-unes, comme la Compaña del Hercule près de Queretaro, la Estrella près de Parras, la Belem près de Durango, la Reforma près de Guanajuato, employaient de 500 à 900 ouvriers. Depuis lors il s’en est élevé de nouvelles. La grande majorité sont de petites usines hydrauliques occupant de 150 à 200 ouvriers, hommes, femmes et enfans. Ces manufactures ont généralement un outillage perfectionné venant de France, d’Angleterre, de Belgique. Elles sont aujourd’hui en état de fournir complètement à la consommation des classes populaires. C’est donc un marché à peu près fermé aux cotonnades communes de l’Angleterre et des États-Unis.

En dehors des fabriques de textiles, on compte une demi-douzaine de papeteries. Récemment, il s’est établi quelques fonderies de plomb argentifère et de fer dans les États du Nord.

Les salaires industriels dépassent sensiblement ceux de l’agriculture, mais restent très inférieurs à ceux des États-Unis et de l’Angleterre. Ils varient entre 75 et 37 centavos par jour pour les hommes, 75 et 25 centavos pour les femmes, 37 et 20 centavos pour les adolescens. Ces écarts considérables tiennent surtout aux provinces. Dans les États du Nord et dans celui de la Vera-Cruz, les salaires sont à peu près le double de ce qu’ils sont dans les États du Sud et sur la côte du Pacifique. Les ouvriers d’art, par exemple les mécaniciens attachés aux usines, ont naturellement des salaires plus élevés ; comme les manouvriers, ils se recrutent dans la population indienne, pure ou métisse, qui a une grande aptitude à s’assimiler les procédés techniques et qui fournit avec empressement le personnel