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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 juin.

Par une singularité précieuse, qu’il importe de signaler, les députés que nous élirons dans sept semaines seront issus du même mode de scrutin que ceux qu’ils remplaceront. C’est la seconde fois seulement, depuis un quart de siècle, que cette perpétuité se produit chez nous.

Au scrutin uninominal de 1869 succéda le scrutin de liste de 1871, puis le vote par circonscription de 1876, ensuite le vote par département de 1885, enfin le scrutin d’arrondissement de 1889. Cette fois, bien que d’ingénieux novateurs aient proposé le « scrutin de liste par arrondissement, » il n’a pas été sérieusement question de savoir si le suffrage universel procéderait, en gros ou en détail, au recrutement de ses délégués ; mais la chambre n’en a pas moins consacré bon nombre de séances testamentaires à régler l’ordre de sa succession. D’abord, elle s’est appliquée, pour éviter que l’électeur ne fût en butte à aucune pression, pour lui laisser par conséquent plus de liberté dans ses choix, elle s’est appliquée à restreindre, à rogner de mille façons la liste des éligibles, en établissant l’incompatibilité de fonctions de toute nature avec le mandat de député.

Dans un vaudeville de Ludovic Halévy on faisait connaître, par prudence, aux convives d’un dîner de noces, les a choses dont il ne fallait pas parler devant M. le comte Escarbonnier, » personnage de marque, honorant la fête de sa présence, qu’on devait éviter de contrarier ; ainsi la majorité de la chambre a cru devoir dresser un état des « gens qu’il ne faut pas laisser se présenter aux électeurs, » parce qu’il convient d’empêcher les électeurs d’être violentés. Or la candidature de ces personnes exclues aurait un caractère officiel tellement prononcé, que nul ne pourrait lutter contre elles avec succès. « Le mandat de