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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mai.

Quatre mois nous séparent encore du renouvellement de la chambre, et déjà le souffle de l’esprit électoral fait éclore les comités et pousser les harangues politiques. Des discours, nous en avons eu passablement depuis quelques semaines, sur divers points du territoire. À commencer par M. Goblet pour finir par M. Calla, en passant par MM. Spuller, Lockroy, Lavertujon, Piou et autres, sans parler des membres du gouvernement auxquels leur situation impose plus de réserve, les représentans des divers partis ont tenu à afficher leur programme, à déployer leurs espérances.

Quelle sera cette chambre de demain ? À quelles mains allons-nous, souverains d’un jour, confier à l’automne prochain, pour quatre nouvelles années, l’exercice effectif de notre pouvoir ? Il est permis de conjecturer, à plusieurs symptômes, que le groupement politique actuel touche à sa fin, que des courans nouveaux vont sans doute agglomérer, dans des combinaisons nouvelles, les molécules parlementaires. Peut-être ne sont-ce pas tant les hommes qui vont changer que les idées, les vieilles épithètes qui ont perdu leur sens originel et perpétuent des fictions imperceptibles ou des nuances légendaires. Cette modification dans les opinions est d’ailleurs bien plus désirable, bien plus importante pour l’orientation future du pays, que ne le seraient de simples changemens de personnes. L’homme qui se juge mal vêtu doit songer à réformer son habit, plus encore qu’à réformer son tailleur.

D’un côté, les radicaux annoncent leur intention bien arrêtée de rompre avec l’opportunisme : « Tout, dit M. Goblet à Amiens, plutôt que la continuation de ce régime, ce devrait être le mot d’ordre. » En même temps l’ancien président du conseil de 1887 n’hésite pas à rechercher l’alliance des socialistes, internationalistes et autres partisans