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LES DUNES
1658[1]


I.

« … Et je suis persuadé que vous les verrez sortir de leurs lignes pour vous combattre avec un grand avantage, puisque c’est un poste d’infanterie que vous voulez occuper et qu’ils en ont beaucoup plus que vous. — Et moy, monsieur, respondit dom Juan, je suis persuadé que les ennemis n’oseront seulement regarder l’armée du Roy catholique. — Vous ne connoissez pas M. de Turenne, réplique le Prince. Jamais homme n’a si bien sceu profiter des occasions, et il est très dangereux de faire des fautes devant un si grand capitaine. » — Toutes les raisons du Prince ne purent vaincre l’opiniâtreté de dom Juan, qui plus que nul autre estoit enflé de la présomption naturelle aux Espagnols ; on se mit donc en marche et on se posta à une lieue des lignes, entre le canal de Furnes et la mer, sur les dunes, où la cavalerie ne pouvoit agir. Deux jours après, le Prince ayant esté adverty par les gardes du camp, le 14 juin 1658, que l’on voyoit les ennemis sortir de leurs lignes, il voulut faire un dernier effort pour persuader à

  1. Histoire des Princes de Condé, liv. VI, ch. X. (Ce chapitre fera partie du tome VII et dernier.)