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que les démocrates reprennent aussi complètement possession du pouvoir. Jusqu’ici ils n’avaient eu que des avantages locaux, partiels. M. Cleveland lui-même, dans son premier passage au gouvernement de l’union, n’était pas entièrement libre et se sentait gêné par le congrès. Aujourd’hui, le retour est complet. Les démocrates, longtemps réduits à l’état de vaincus, ont retrouvé le succès et sont maîtres de la Maison-Blanche comme du prochain congrès. Ils reviennent au pouvoir, éclairés sans doute par une dure expérience, et leur chef, M. Cleveland, ne pouvait certes mieux commencer son nouveau règne qu’en promettant de relever les mœurs publiques à l’intérieur, de renouer des relations plus libérales avec l’Europe.


CH. DE MAZADE.

LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Le coup de théâtre de la déposition de Mme Cottu, suivi de la démission du garde des sceaux, M. Bourgeois, a eu pour résultat de faire reculer la rente française de près d’une unité dans la Bourse du 13 courant.

Mais on aurait tort de supposer que les préoccupations se rattachant à l’affaire de Panama aient été l’unique cause de la faiblesse subite de la rente. Si, du samedi 11 au lundi 13, le 3 pour 100 a fléchi de 97.80 à 97.25, il avait déjà reculé, depuis la dernière liquidation, de 98.30 à 97.80, et il paraissait évident que ces hauts cours n’étaient soutenus qu’artificiellement, trop de facteurs se réunissant contre une continuation de la campagne de hausse poursuivie en février.

Depuis deux ou trois ans, la Caisse des dépôts et consignations achetait des rentes françaises pour un montant moyen de 20 à 30 millions de francs par mois. Rien ne pouvait résister à l’action de ces achats incessans, quotidiens, effectués par une caisse disposant de ressources en apparence inépuisables et qui jamais ne semblait devoir rendre au marché la moindre parcelle du stock de rentes qu’il lui enlevait. La rente a été portée au pair, non que notre situation budgétaire ou économique justifiât ce cours, mais parce que l’absorption continue de titres par la Caisse des dépôts avait détruit l’industrie de la spéculation à découvert à la Bourse et annihilé tous les efforts tentés pour enrayer un tel mouvement de progression.

Un jour est arrivé où le rendement moyen du portefeuille des caisses d’épargne est devenu inférieur à l’intérêt que la Caisse des dépôts doit