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LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Après la poussée si vive donnée aux cours de nos fonds publics dans la dernière quinzaine de janvier, on aurait pu supposer que les haussiers se tiendraient pour satisfaits et limiteraient leurs efforts au maintien des cours acquis en liquidation. Le 3 pour 100 a été compensé à 97.60, l’amortissable à 98.20, le 4 1/2 à 106 francs, ce dernier prix s’entendant déduction faite du coupon trimestriel de 1 fr. 12 détaché le jour même de la liquidation, 1er février.

Il n’en a pas été ainsi et les rentes ont fait de nouveaux progrès. Le 3 pour 100 était déjà cependant en reprise de quatre unités ; le cours le plus bas coté dans la crise de Bourse provoquée par l’affaire de Panama avait été en effet 93.60. Mais la brusquerie même de cette hausse a rendu nécessaires de rapides rachats du découvert ; le 3 pour 100 et l’amortissable ont été liquidés avec un déport moyen de 4 1/2 et 22 1/2 centimes, le 4 1/2 avec un report moyen de 0 fr. 04. Ces conditions révélaient une situation de place où les baissiers, quelque bonnes raisons qu’ils eussent de trouver la situation politique générale encourageante pour le maintien de leurs positions, se trouvaient à la merci de leurs adversaires. Des exécutions ont suivi la liquidation, la rente 3 pour 100 a été portée à 98 francs, l’amortissable à 98.60, le 4 1/2 à 106.60.

Certes, si le public financier n’avait eu à prendre conseil que de la confusion croissante où les développemens de l’affaire de Panama jetaient la situation parlementaire et gouvernementale, la tendance eût été à la baisse plutôt qu’à la hausse. Mais l’intervention irrésistible de quelques puissances financières venait de rappeler à la Bourse qu’elle se trompe, en règle générale, lorsqu’elle oriente trop exclusivement ses préoccupations et ses calculs du côté de la politique. Une hausse de quatre points, malgré une succession si rapide de séances à sensation, d’interpellations, de menaces de dislocation ministérielle, était un argument décisif devant lequel il fallait s’incliner.

D’autre part, une opération énorme de conversion était engagée en Autriche-Hongrie et absorbait toute l’attention et les efforts des marchés d’outre-Rhin. L’optimisme était prédominant à Vienne, à Berlin, à Francfort ; le marché de Londres suivait lui-même ce courant et la plupart des fonds internationaux étaient emportés dans un mouvement général de reprise. L’aisance est plus grande que jamais sur le marché monétaire, l’escompte se tient sur toutes les places au taux