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deux édifices, entre tous ceux qui existent encore à Samarkande, sinon au point de vue de l’ancienneté, du moins à cause de l’intérêt historique qu’il présente, ainsi que pour l’élégance de son style.


V. — LE CHAH-ZINDEH.

Le monument le plus curieux et le mieux conservé de Samarkande, bien qu’il en soit aussi le plus ancien, c’est le groupe de constructions appelé Chah-Zindeh. On désigne sous ce nom la réunion de sept mosquées, enfermées dans une enceinte commune, et qui couvrent une petite colline située au nord de la ville, en face de la Biby-Khaneh, laquelle n’en est séparée que par la vaste esplanade du marché. On ne sait pas au juste à quelle époque remonte la fondation de ces sept mosquées ; mais une partie au moins de leur construction est antérieure à Tamerlan. L’architecture en est admirable de richesse et d’harmonie, et heureusement la conservation en a été jusqu’à présent suffisante. Les sept dômes, que revêtent des briques émaillées de ce bleu splendide qui caractérise la décoration architecturale de Samarkande, s’étagent sur la colline et donnent l’illusion d’un ensemble beaucoup plus vaste que celui qu’elles constituent réellement ; car les proportions de ces édifices, exquis dans leur délicatesse, ne sont pas très grandes et ils sont bien loin d’avoir l’ampleur et le caractère colossal de la Biby-Khaneh. Mais l’absence de tout point de comparaison aux alentours, sur cette colline dénudée, et l’illusion d’optique qui résulte de l’illumination par le soleil d’Orient, donnent complètement le change à cet égard. Ces sept mosquées sont réunies entre elles par un tortueux chemin couvert, enclos entre des murs et coupé d’escaliers irréguliers et pittoresques. Sur ce chemin s’ouvrent les portiques des diverses chapelles dont l’ornementation est certainement ce que l’art des architectes et des décorateurs persans, à la solde des souverains mongols, a produit de plus merveilleux. Les murs sont entièrement revêtus de faïences éclatantes, aux couleurs très variées et plus diverses encore que celles que l’on peut voir dans les autres monumens de Samarkande ; mais ici, ce qui n’a lieu nulle part ailleurs, les faïences ne sont pas seulement ornées de dessins ; ces dessins, dont l’élégante complication est extrême, sont en outre modelés en relief et les briques émaillées qui les forment sont à jour. On dit que cette disposition se retrouve dans une autre mosquée à Djaniekent, bourgade du Turkestan septentrional. L’effet décoratif qui en résulte est extrêmement heureux. Les mosquées qui occupent le deuxième et le troisième rang à gauche, en suivant l’avenue, sont d’une richesse