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REVUE DRAMATIQUE

Comédie-Française : Reprise du Père prodigue, comédie en 5 actes, de M. Alexandre Dumas fils. — Théâtre du Vaudeville : l’Invitée, comédie en 3 actes, de M. François de Curel.

« Je cherchai, dit M. Alexandre Dumas fils dans une de ses préfaces, je cherchai le point sur lequel la faculté d’observation dont je me sentais ou me croyais doué pouvait se porter avec le plus de fruit, non-seulement pour moi, mais pour les autres. Je le trouvai tout de suite. Ce point, c’était l’amour. » — C’est parce que le Père prodigue ne touche pas ce point, ou le touche fort peu, que le Père prodigue ne restera peut-être pas parmi les meilleurs ouvrages de M. Dumas fils et les plus essentiels, parmi les plus formelles manifestations de sa pensée, de son talent et de sa manière.

Par extraordinaire, le sujet du Père prodigue n’est pas la relation entre les deux sexes, entre deux représentans, variables d’ailleurs, de l’un et de l’autre : mari et femme, amant et maîtresse, chaste jeune homme et fille-mère, courtisane et jeune homme naïf ; non, c’est la relation entre un père et un fils, un fils légitime, ce qui supprime encore un élément d’intérêt cher à M. Dumas. Le Père prodigue est, avec la Question d’argent, la comédie où l’auteur est le moins lui-même, celle dont les critiques, pour étudier et définir le théâtre du maître, peuvent le plus aisément se passer. M. Paul Bourget nomme à peine le Père prodigue dans ses Essais de psychologie contemporaine, et dans les Idées morales du temps présent, M. Édouard Rod ne le cite pas. Enfin M. Dumas, comme s’il reconnaissait lui-même que sa pièce n’a rien à voir avec ses thèses favorites, y a mis une préface non de