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POÉSIE

SONNETS[1]


REGILLA.


Inscription Triopéenne du Louvre.

Passant, ce marbre couvre Annia Regilla
Du sang de Ganymède et d’Aphrodite née.
Le noble Hérode aima cette fille d’Énée.
Heureuse, jeune et belle, elle est morte. Plains-la.

Car l’Ombre dont le corps délicieux gît là,
Chez le prince infernal de l’Ile Fortunée
Compte les jours, les mois et la si longue année
Depuis que loin des siens la Parque l’exila.

Hanté du souvenir de sa forme charmante,
L’Époux désespéré se lamente et tourmente
La pourpre sans sommeil du lit d’ivoire et d’or.

Il tarde. Il ne vient pas. Et l’âme de l’Amante,
Anxieuse, espérant qu’il vienne, vole encor
Autour du sceptre noir que lève Rhadamanthe.

  1. Nous sommes heureux d’offrir aux lecteurs de la Revue la primeur de ces quelques Sonnets que M. José-Maria de Heredia a bien voulu détacher de son volume des Trophées, qui doit paraître prochainement chez l’éditeur A. Lemerre.