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C’est bien fini : rentré, meurtri, de la bataille,
Le preux s’est, pour mourir, de son long étendu ;
Marquant, avec du sang, son nom à la muraille,
Et priant Monseigneur Dieu pour qu’il ne lui faille,
Et reçoive son gant qu’il n’a jamais rendu.

Allez, sonnez du cor dans la forêt profonde,
Allez, jetez au vent des cris de rendez-vous !
La pâle fleur des bois se mire encor dans l’onde,
Le convive, aux festins, passe la coupe ronde,
Mais las ! Mon cœur n’est plus, si fidèle et si doux.


IV. ÉROS ET PSYCHÉ (de Baudry).


Assis légèrement au bord du siège antique,
Le dieu retient Psyché, tremblante, sur son cœur,
D’un geste si charmant, dans sa grâce pudique,
Qu’il semble que Psyché soit une jeune sœur :
À peine si ses doigts pressent la chère épaule !
Perdue aux flots de gaze, et souple comme un saule,
La tête renversée, et dans ses cheveux blonds,
Portant une fleur blanche, une fleur de la plaine,
Elle fixe sur lui ses doux regards profonds :
Sur sa bouche entr’ouverte on sent sa jeune haleine…
Svelte, un bandeau d’argent ceignant ses longs cheveux,
Le jeune dieu, pensif, et comme curieux,
Attire doucement et presse à sa poitrine
Une main de Psyché, les yeux sur ses yeux bleus.
Un sentiment exquis, d’une essence divine,
Comme un souffle du ciel, les anime tous deux.
Craintive, l’autre main de la jeune immortelle
Tient Éros embrassé, dont elle effleure l’aile,
Et la gaze, en longs plis qui tombe chastement,
Laisse à peine entrevoir son pied très vaguement.

CHARLES DE BERKELEY.