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ministère, et par les divisions dont il a été la première cause dans le parti conservateur, et par l’obstination qu’il a mise à se faire le protecteur des abus de la dernière administration municipale de Madrid. M. Canovas, en introduisant M. Romero-Robledo dans son cabinet, avait cru se donner une force de plus ; il s’est créé une faiblesse. Ce n’est pas lui, c’est son compromettant collègue qui a préparé et décidé la défaite du ministère.

Comment les choses vont-elles maintenant tourner au-delà des Pyrénées ? À première vue, M. Silvela, le chef des dissidens, aurait paru devoir jouer un rôle dans le dénoûment de cette crise. En réalité, eût-il été disposé à l’accepter, et il ne paraît pas en avoir eu un instant la pensée, il ne pouvait rien. Il n’aurait pas eu l’appui des libéraux, et il ne pouvait plus compter sur les conservateurs demeurés fidèles à M. Canovas. Dès le premier jour, toutes les chances étaient pour M. Sagasta, qui n’a pas tardé, en effet, à être appelé au palais et qui a eu bientôt formé son cabinet libéral. C’est la situation aujourd’hui. L’Espagne rentre donc avec M. Sagasta dans une expérience libérale après avoir eu depuis deux ans, avec M. Canovas, l’expérience conservatrice. Le tout est de savoir si le nouveau président du conseil réussira à dominer les divisions de son propre parti, à prolonger pour l’Espagne une ère de paix fructueuse.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

La crise ministérielle et l’émotion soulevée par l’enquête parlementaire sur les affaires de Panama avaient, dans les derniers jours de novembre, fait reculer la rente française de 99.80 à 99.40. Une nouvelle réaction suivit les premiers incidens de la crise, et la liquidation s’effectua en pleine crise, à peu près au plus bas cours, 99.15 sur le 3 pour 100, avec des taux de report, il est vrai, relativement modérés, situation était peu encourageante pour les haussiers ; les vendeurs comptaient sur l’appui des événemens pour prendre une revanche au moins passagère de leurs longs déboires. Mais l’échec de la combinaison Brisson leur apporta une prompte déception. Les cours de la rente se relevèrent brusquement et les rachats des échelliers poussèrent le