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personne honorable, et confirmée, disait-on, par lady Hornby. Or M. Balfour, directeur du North China Herald, qui connaissait bien sir Edmund et le reporter, adressa au Nineteenth century une lettre dans laquelle il appelait l’attention sur les points suivans : 1° sir Edmund Hornby était veuf à l’époque dont il parle : sa seconde femme était morte deux ans auparavant, et il ne se remaria que trois mois après ; 2° sir Edmund parle d’une enquête faite sur la mort du reporter : d’après le coroner, aucune enquête ne fut faite ; 3° sir Edmund mentionne un jugement déterminé qui aurait été rendu le 20 janvier 1875 : il n’y a aucune trace de ce jugement dans la Supreme court and consular gazette ; 4° sir Edmund dit que le reporter mourut à une heure du matin, il est mort entre huit heures et neuf heures. Il paraît que sir Edmund Hornby, à qui la lettre de M. Balfour fut communiquée, reconnut, quoique de mauvaise grâce, la vérité de ces observations[1].

En admettant que M. Maudsley qui rapporte ce fait dans un livre destiné à combattre la croyance au surnaturel, l’ait rapporté avec la plus scrupuleuse exactitude, on n’en peut guère rien conclure, sinon que de minutieuses précautions s’imposent aux observateurs. Il n’est pas impossible, malgré tout, que dans les deux cas d’erreur que je viens de citer, un manteau d’illusions recouvre et cache un fait réel de télépathie ou de lucidité. Quoi qu’il en soit, bien d’autres cas ont été rapportés avec plus de garanties. Les faits les plus extraordinaires ont pu, par la quantité et la qualité des témoignages et des diverses vérifications, prendre un air de vraisemblance. Une méthode plus rigoureuse a diminué les chances d’erreur. On peut s’en convaincre par la lecture des Hallucinations télépathiques de MM. Gurney, Myers et Podmore dont l’ouvrage a été traduit en français et abrégé par M. Marillier, et par l’examen des Annales des sciences psychiques, dirigées par M. le docteur Dariex.

Voici, par exemple, un des cas où la vraisemblance est la plus forte. M. Frédéric Wingfield rêve une nuit qu’il voit son frère Richard Wingfield-Baker assis sur une chaise devant lui. Il lui parle, et son frère ne répond qu’en inclinant la tête, puis se lève et quitte la chambre. Lorsque M. Wingfield se réveille, il se trouve debout, un pied posé par terre et l’autre sur le lit, essayant de parler et de prononcer le nom de son frère. « L’impression qu’il était réellement présent était si forte, et toute la scène que j’avais rêvée était si vivante, que je quittai la chambre à coucher pour chercher mon frère dans le salon. »

  1. Maudsley, Natural causes and supernatural seemings, p. 79-80.