moins d’appareil, et sans se soucier de strophe, d’antistrophe ni d’épode, — rythmé le contour de son ode sur celui de l’ode horatienne ? Et enfin, comme Ronsard toujours, — sans peut-être en faire autant d’étalage, — a-t-il, aussi lui, plus qu’usé de la friperie mythologique ? Je prends l’une de ses premières odes : A Marie de Médias, sur sa bienvenue en France, et en moins d’une cinquantaine de vers j’y vois défiler tour à tour : Vénus, Diane, l’Aurore, Céphale, les Grâces, Neptune, Hercule, Ganymède, Achille, les Parques, Encelade, Apollon, Phaéton, Eurysthée, qui sais-je encore ?
La voici, la belle Marie.
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Telle n’est point la Cythérée,
Quand, d’un feu nouveau s’allumant,
Elle sort, pompeuse et parée,
Pour la conquête d’un amant.
Telle ne luit en sa carrière
Des mois l’inégale courrière.
Et telle, dessus l’horizon
L’Aurore au matin ne s’étale,
Quand les yeux mêmes de Céphale
En feraient la comparaison.
En voulez-vous une autre ?
Cet Achille de qui la pique
Faisait aux braves d’Ilion,
La terreur que fait en Afrique
Aux troupeaux l’assaut d’un lion,
Bien que sa mère eût à ses armes
Ajouté la force des charmes,
Quand les Destins l’eurent permis,
N’eut-il pas sa trame coupée
De la moins redoutable épée
Qui fut parmi ses ennemis ?
Pour retrouver une semblable accumulation de souvenirs mythologiques, c’est à Ronsard qu’il faut que l’on remonte, jusqu’à l’ode fameuse Au chancelier de l’Hospital. N’ajouterai-je pas à ce propos que, de cent cinquante ou soixante Odes que nous avons de Ronsard, il n’y en a pas plus d’une quinzaine où le poète ait affecté de reproduire le dessin de l’ode grecque. Mais, de l’ode pindarique, il s’est laissé, comme Malherbe, insensiblement glisser à l’ode horatienne ou anacréontique. Et si ce n’était chez Ronsard ou chez quelqu’un des siens, à moins que ce ne fût dans Horace, on ne voit pas enfin où Malherbe aurait pris les modèles de ses entrelacemens de rimes et de rythmes. L’Ode à Marie de Médicis est de l’année 1600, et le poète approchait de la cinquantaine.