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faculté de déposer leurs lingots ou leurs espèces à la trésorerie contre des billets d’État, d’un chiffre égal à la valeur marchande du métal blanc au moment du dépôt. Ces billets devaient être remboursables à vue : 1° soit en une quantité de métal représentant, au cours du jour de leur présentation, une valeur égale au nombre des dollars exprimé sur le billet ; 2° soit en or au choix du gouvernement ; 3° soit en dollars d’argent au choix du porteur. Cette combinaison exposait le trésor à une perte si l’argent continuait à baisser, mais M. Windom était convaincu que son plan amènerait nécessairement la hausse du métal blanc. Ce projet souleva les discussions les plus orageuses au sein des deux chambres et ne put aboutir qu’au bout de six mois. Les silvermen ne voulaient à aucun prix renoncer au débouché que leur offraient les achats d’argent imposés au trésor par l’obligation de frapper mensuellement 2 millions de dollars. Il fallut leur donner satisfaction sur ce point. La loi qui porte la date du 14 juillet 1890 débute par imposer au trésor l’obligation d’acheter, chaque mois, des lingots d’argent jusqu’à concurrence d’un poids total de 4,500,000 onces. Pour payer ces achats de métal, le trésor doit émettre des billets d’État, dont la valeur ne peut être inférieure à 1 dollar ni supérieure à 1,000 dollars ; ces billets sont remboursables à présentation, en monnaie métallique, à la trésorerie ou dans ses succursales, et ils peuvent être réémis. Ils sont considérés comme monnaie légale pour l’acquittement de toutes dettes, soit publiques, soit privées, à moins d’une clause contraire expressément stipulée, et ils sont recevables en paiement des droits de douane, taxes et autres sommes quelconques ; quand ils ont été ainsi reçus, ils peuvent être émis de nouveau. Détenus par les banques nationales, ils peuvent être considérés comme faisant partie de leur réserve légale. Sur la demande de tout porteur de billet, le trésor, conformément à un règlement à établir, rachètera ces billets en monnaies d’or ou d’argent, à sa discrétion. Les États-Unis mettent les deux métaux sur le même pied, sauf à tenir compte du rapport légal actuel ou de celui qui pourrait être déterminé dans l’avenir. La frappe des dollars d’argent cessait d’être obligatoire à partir du 1er juillet 1891.

Il est malaisé d’apercevoir quels avantages le gouvernement américain peut retirer de cette nouvelle législation, après les amendemens qu’il a dû accepter. Sans doute, il ne verra plus revenir à bref délai dans les caves du trésor les dollars dont la frappe lui était imposée, mais il devra y emmagasiner en quantité équivalente des lingots d’argent qui seront virtuellement monnayés sous la forme de billets d’État, ayant une valeur libératoire illimitée, même pour les dettes publiques. Tous les avantages sont pour les