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précieux, à la circulation monétaire, à la contrefaçon et à l’altération des monnaies. C’est fort tardivement que le gouvernement s’est mis en mesure de s’acquitter de cette mission : un décret du 1er février 1886, rendu sur la proposition de M. Sadi Carnot, alors ministre des finances, a constitué, sous le nom de commission permanente des monnaies, un centre d’informations et d’études ; mais l’activité de cette commission ne s’est encore traduite que par un avis récent en faveur du maintien de l’Union ; et les commissions analogues, créées dans les autres pays, ne paraissent pas avoir été plus laborieuses. Bien que tous les membres de l’Union aient proclamé la nécessité de se préparer pour le grand jour de la démonétisation universelle de l’argent, ils s’en sont tenus à cette déclaration : la Belgique seule a tenté quelque chose. Comme sa monnaie divisionnaire n’atteignait pas le chiffre qui lui était attribué par les conventions, elle l’a complétée par la frappe de 7,800,000 francs dont le métal a été prélevé sur les écus belges de 5 francs en circulation. Ses écus étant à 900 millièmes de fin, et ses monnaies divisionnaires à 835 millièmes seulement, il est résulté de cette opération, tous frais déduits, un bénéfice d’environ 400,000 francs que le gouvernement belge a appliqué à créer un commencement de dotation pour « un fonds spécial de provision monétaire » qui servira à réduire le nombre des écus belges. La somme ainsi mise en réserve peut paraître insignifiante relativement à l’importance de la circulation belge ; cette initiative n’en est pas moins louable par l’esprit de prévoyance qu’elle atteste. Depuis lors, le gouvernement belge a annoncé aux chambres qu’il comptait mettre en réserve, pour la dotation du fonds de prévision, le boni de plusieurs millions réalisé par la Caisse des dépôts et consignations. La France également n’a point le contingent de monnaies divisionnaires auquel elle a droit : il s’en faut de 18 à 20 millions ; et la pénurie des petites pièces provoque souvent des plaintes dans les centres manufacturiers. On n’oserait cependant donner à la France le conseil de suivre l’exemple de la Belgique : il serait à craindre que le bénéfice de l’opération, au lieu d’être mis en réserve, ne servît à boucher quelque trou du budget. Une occasion s’offre aujourd’hui aux commissions monétaires permanentes de donner enfin signe de vie ; c’est la proposition faite par le gouvernement américain de réunir une conférence universelle ; mais avant d’émettre une opinion sur cette proposition, il convient de retourner de quelques années en arrière et de faire un court historique des conférences antérieures.


CUCHEVAL-CLARIGNY.