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emprunt espagnol que la Banque de Paris et des Pays-Bas préparerait avec le cabinet Canovas.

La réalisation de ces affaires et d’autres analogues est subordonnée à la continuation du calme absolu qui a régné jusqu’ici dans les affaires tant extérieures qu’intérieures. Au dehors, rien ne semble devoir troubler ce calme. La presse internationale dénie toute importance politique à l’entrevue des deux empereurs d’Allemagne et d’Autriche-Hongrie, et ne découvre rien d’immédiatement inquiétant dans l’énormité des nouveaux sacrifices que la loi militaire en projet à Berlin réserve aux contribuables allemands. La note adressée par la Russie à la Porte au sujet des complaisances que la Bulgarie rencontre à Constantinople a rappelé aux puissances de la triple alliance la nécessité de ne rien vouloir précipiter dans les affaires de la péninsule balkanique.

Nos affaires intérieures ne sont pas exemptes de quelques élémens de perturbation. L’affaire de Carmaux excite des débats passionnés. Le gouvernement, après avoir laissé tout faire pendant deux mois, met en branle la force publique juste une semaine avant l’ouverture de la chambre des députés, ce qui est de l’opportunisme à haute dose : il s’agit de sauver le principe de la stabilité ministérielle. À ce premier objet de discorde, on peut ajouter le traité franco-suisse, contre lequel le chef du protectionnisme vient de prononcer l’anathème à Remiremont. Il y a surtout la question budgétaire qui devient sérieuse par la disparition des plus-values mensuelles auxquelles on s’était habitué, et à cause du flot sans cesse grossissant des crédits supplémentaires. La question du renouvellement du privilège de la Banque de France peut aussi ne pas arriver sans heurt à sa solution. Les premières semaines de la session seront sans doute assez animées, et cette considération a contribué à maintenir la Bourse dans une attitude de grande réserve.

La grande querelle faite par la Compagnie des agens de change à la coulisse à propos de la petite Bourse du soir a reçu une solution bâtarde. Les agens, dans leur lettre de septembre, avaient demandé la suppression pure et simple de cette petite Bourse, ce qui était logique et se pouvait défendre. Le conseil des ministres, après avoir agité la question à plusieurs reprises, a compris ou feint de comprendre qu’on lui demandait d’interdire la tenue de la petite Bourse dans un local clos et couvert. Le hall du Crédit lyonnais réunissant ces deux conditions, le gouvernement a décidé que la petite Bourse ne devrait plus s’y tenir, mais qu’elle pouvait se réunir valablement devant la porte dudit édifice, sur le boulevard. Rien n’est piteux comme cette conclusion du conflit, conclusion provisoire selon toute apparence.

Si le 3 pour 100 a baissé, suivi dans ce mouvement rétrograde par l’amortissable, le 4 1/2 s’est bien tenu à 106 francs. Les temps